lundi 14 avril 2025

RETRADUIRE GRAHAM GREENE : JOURNAL DE TRADUCTION (1)


RETRADUIRE GRAHAM GREENE : JOURNAL DE TRADUCTION

• ÉPISODE 1 – GRAHAM GREENE, LE RETOUR 

Les éditions Flammarion se lancent dans une aventure aussi ambitieuse qu’excitante, et aussi salutaire que surprenante : proposer de nouvelles traductions de l’œuvre de Graham Greene. Le projet, initié par Bertrand Pirel, a pour but de dépoussiérer des textes dont certaines des traductions françaises encore en circulation ont parfois jusqu’à soixante-dix au compteur ; oui, car elles ont vieilli, ce qui est l’étrange privilège des traductions. Question : pourquoi les traductions vieillissent-elles, alors que l’œuvre originale semble relativement à l’abri du temps? C’est là une question passionnante sur laquelle je reviendrai très bientôt dans cette série qui promet d’être fleuve.

M’étant vu confier cette mission, je me dois de corriger tout de suite une idée reçue, ou plutôt une erreur de formulation : je ne retraduis pas l’œuvre de Greene, et ce pour la simple raison que je ne l’ai pas traduite auparavant. Je ne repasse donc pas par un chemin déjà emprunté (par moi) : Je traduis, c’est tout, comme si l’œuvre de Greene venait d’arriver sur mon bureau, encore fraîche et inédite. Si je m’interdis de regarder l’ancienne version existante en cours de traduction, c’est pour ne pas interposer entre mes doigts et le clavier un calque mal(f)aisant, et me protéger d’un effet d’écho – bien sûr, une fois ma traduction achevée, j’irai voir la version précéente, un peu comme on consulte le Gaffiot par curiosité (bonjour les latinistes !), afin de voir comment telle phrase de Greene s’est vue rendre justice ou a été aplatie. Quel effet le Temps a eu sur son texte… Mais pour lors, je veux aborder ce continent – plus d’une vingtaine d’ouvrages en chantier… – d’un œil neuf, pour ne pas dire immature. Avant d’accepter ce travail, bien sûr, j’ai parcouru les livres de Greene (plus d'une vingtaine…), vu ou revu certaines adaptations cinématographiques de ses romans (près de vingt-cinq), dévoré ses diverses biographies (au moins trois, dont une en trois volumes !) – et, Troisième Homme oblige, fredonné sans m'en rendre compte l’air de Harry Lime…

Pendant plusieurs semaines, au fil des traductions et parutions, je publierai ici, à un rythme régulier, une sorte de journal de travail, où il s'agira à la fois de déplier ces formidables feuilletés que sont les textes de Greene et d'expliquer les raisons qui nous ont appelés à en imaginer de nouvelles versions. Au programme pour commencer, Le Ministère de la Peur (préfacé par mes soins), suivi de Deux Hommes en un (préfacé par William Boyd)– les deux paraissent cette semaine.

________________
A noter: jeudi 17 avril, à 19h, aura lieu une rencontre autour de ces deux premiers livres à la librairie L'usage du monde, 2 rue de la Jonquière (75017) en présence de l'éditeur, du traducteur et de Jonathan A. Bourget, petit-fils de Graham Greene.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire