Il semblerait que le récit autobiographique d'Hemingway, Paris est une fête, se vende en ce moment comme des petits pains, son titre opérant à la fois comme sésame de résilience et offrande symbolique sur les lieux de massacre parisiens. Bien sûr, le titre français y est pour quelque chose, car en anglais, le livre s'intitule A moveable Feast, autrement dit "une fête mobile", par opposition aux "fêtes fixes".
Par exemple, en anglais, si vous dites "it's a moveable feast", ça veut dire "Il n'y a pas de date fixe". Bien sûr, Hemingway a joué aussi sur le sens de "feast", qu'on peut traduire par festin, banquet, réjouissances. On peut donc supposer très naturellement que si l'on avait choisi comme titre français Sans date fixe, il ne susciterait pas aujourd'hui l'engouement qu'il suscite – la notion d'imprévisible étant soudain nettement, et cruellement, moins séduisante. Par ailleurs, le livre est paru de façon posthume, Hemingway s'étant tiré une balle dans la tête trois ans avant sa parution.
Mais l'histoire éditoriale a tranché : ce sera et c'est Paris est une fête. Preuve s'il en est que les traducteurs sont des gens profondément optimistes. Et les Parisiens sensibles à leurs trouvailles. Mais peut-être que Le Festin nu de Burroughs aurait lui aussi fait l'affaire… Ou mieux: L'innommable, de Becket…