Les Foudroyés, ou l’histoire d’un tremblement secret
Un vieil homme se meurt. Allongé sur un lit d’hôpital installé au centre de son salon, entouré de sa famille – épouse, sœur, enfants et petits-enfants qui se relaient pour le nourrir, faire sa toilette, lui faire la lecture, changer ses draps –, George Washington Crosby, ancien horloger, sent le temps se rompre, les heures entamer leur compte à rebours final, et le monde peu à peu lui échapper. Tantôt il hallucine, tantôt tout s’obscurcit autour de lui. Et dans le chaos de cette agonie, se précipitent les souvenirs. Notamment de son père, Howard, représentant de commerce dans un coin rural et sauvage de la Nouvelle-Angleterre, vendeur de tout et de rien qui parcourait la lande avec une charrette remplie d’articles divers, clous, savon, tabac, vaisselle, etc. Amoureux de la nature (et lui-même hanté par la figure de son propre père, pasteur calviniste), Howard s’égarait parfois et, oubliant sa tournée, pouvait s’arrêter des heures au bord d’un ruisseau, dans un champ, dans les bois… et s’y dissimuler le temps que cessent les terribles crises d’épilepsie qui le terrassaient régulièrement…
Mais Les Foudroyés, c'est également l'histoire extraordinaire d'un roman publié à très peu d'exemplaires par un petit éditeur, et qui va rencontrer un beau succès grâce à l'enthousiasme et au soutient de quelques libraires américains. En effet, ce premier roman a eu une carrière éditoriale pour le moins singulière aux Etats-Unis – sorti de nulle part, il s’est attiré quantité de louanges, s’est frayé un beau chemin chez les plus littéraires des libraires « indies », et s’est retrouvé un peu partout sur les « top lists »… avant de remporter le prix Pulitzer du roman en 2010. D’abord refusé par de nombreux éditeurs américains, le texte, après avoir reposé trois ans dans un tiroir, est publié en janvier 2009 par la jeune maison d’édition indépendante Bellevue Literary Press (affiliée au NYU Hospital), qui procède à une premier tirage en poche plus que modeste : 500 exemplaires. Très vite, les libraires s’emballent et le roman de Harding est réimprimé en grand format à 5000 exemplaires. Puis les ventes grimpent rapidement à plus de 10 000 exemplaires, et les consécrations ne cessent d’affluer. Le livre est tout d’abord, Finaliste du Prix du Premier roman 2009 du Center for Fiction, puis il est sélectionné dans le Top 10 des meilleurs livres de 2009 de Publishers’ Weekly, ainsi que dans le Top 10 des meilleurs livres de 2009 de Amazon.com et le Top 5 des meilleurs livres de 2009 de la radio publique NPR. S’en suit un accord avec l’éditeur Random House pour deux autres textes à venir en janvier 2010. Enfin, le 12 avril 2010, Les Foudroyés se voit décerner le très prestigieux prix Pulitzer pour la fiction – Harding apprendra la nouvelle en se rendant sur le site web du Prix. C’est le premier roman publié par une petite maison d’édition indépendante à recevoir cette distinction depuis La Conjuration des Imbéciles.