Quand on traite les libraires, avec mépris et condescendance, de "pauvres petits libraires" – comme l'a fait Gaspard Koenig – en appelant qui plus est à leur suppression et à l'abrogation de la loi Lang, il faut s'attendre à un retour de bâton. Or, voyant, que le bâton revenait dans sa direction, voyant aussi que certains libraires lui promettaient de boycotter désormais ses livres, notre chevalier des lézardes des lettres a cru bon de remettre le couvert, s'étant senti, pour reprendre sa jolie expression, tel un "cerf" dans "une chasse à courre" (on appréciera le choix du cerf, plutôt que celui du lapin…). Et d'y aller d'un propos rassurant:
"Est-il besoin pourtant de préciser que, comme tous les lecteurs, j'apprécie et je fréquente les librairies ? Que, comme tous les auteurs, j'ai intérêt à ce que le secteur du livre prospère ? Que nous partageons tous le même objectif, la diffusion d'une culture de qualité, et pouvons discuter sans tabous des moyens de mieux le poursuivre?"
Est-il besoin, a-t-on envie d'ajouter, d'aligner ces extra-plates évidences? Cela dit, le ton reste inchangé. Koenig "fréquente les librairies", alors qu'il pourrait se contenter d'y aller ou d'y acheter des livres. Mais non, il les fréquente et les apprécie. On dirait qu'il parle de duchesses. Hélas, la réciproque n'est pas pour demain.
Quant au prix unique qu'il appelle à brader, Koenig ne nie pas qu'il existe des arguments en sa faveur. C'est trop de bonté. Ce type fréquente et apprécie aussi l'objectivité: good news. Mais comme il a déjà mis les pieds dans le plat, il faut qu'il noie son brouet libéral dans des citations de Diderot et Dickens (serait-il resté coincé à la lettre D ?) et nous fasse le coup des "corn laws" (!) comme si ces histoires de barrières douanières sur le commerce des grains pouvaient remplacer les stupidités qu'il a énoncées sur ces "pauvres petits libraires" qui selon lui palpent un tiers du montant du livre. Et vous savez quoi? Maintenant, Gaspard ne dit plus les "pauvres petits libraires", il dit: "nos libraires"… La tête se gondole, franchement.
Allez, Gaspard, ne perds plus de temps, écris un troisième article sur la question, lâche-toi, utilise l'expression "chers libraires courageux", vante le prix unique (même avec ses défauts, va…). Bref, consacre-toi pleinement à ce débat d'idées. Vas-y à fond. Tant pis, néglige ton œuvre littéraire ! Personne ne t'en fera le reproche, crois-moi.