mercredi 24 octobre 2007

Madman Bovary (extrait 1)


Il s’agit, je le sais, ne le sais que trop, d’une de ces coiffures d’ordre composite, tout comme moi, qui suis, plus que jamais, super- extra- hyper-composite, fait d’un peu de papa d’un peu de chapska d’un peu de bonnet à poil d’un peu de maman aussi, les deux mêlés et enlacés pour mieux me chapeauter, et faire de moi un chapeau rond, un avorton, une casquette de loutre, un jean-foutre, un bonnet de coton, bref, rappelez-vous, une de ces pauvres choses dont la laideur muette dit assez l’imbécillité générationnelle qui en accoucha – et j’en veux soudain au nouveau de m’offrir, sous les espèces de son couvre-chef charbovarien, la recette à la fois chimique et psychique de mon être en sempiternelle décomposition, car je suis moi aussi ovoïde et renflé de baleines, molletonné de boudins circulaires, finissant en sac ou en polygone cartonné, je ne sais, ou plutôt si je sais, mais ce brevet d’arlequin définit assez bien la pathétique invention qu’est ma petite personne broyée et mitonné à la sauce Croisset.
La casquette de Charles B., que j’ai si souvent autopsiée en pensée sans jamais osé m’en coiffer, me sourit maintenant à même la surface du reflet où mon visage refuse de se noyer. Je pourrais, si je voulais – et le vouloir est facile… – en rester là, rester là, dans ces losanges de velours et de poil de lapin, mémoire de lapin écorché moi-même, géométrie soyeuse mais parfaitement crétine, avec pour seule âme ou ambition, au bout d’un long cordon trop mince qu’aucun courant électrique ne relie plus à la matrice honnie, un petit croisillon de fils d’or en manière de gland, bref, devenir cette effroyable matrice, cette évidence aussi vaine qu’utérine que vient couronner le pompon odieusement doré de moi.
Mais : Levez-vous dit le Professeur. Il se leva : sa casquette tomba.

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