Film n°5, samedi 1er juillet, à 22h…
Une femme fantastique,
de Sebastian Lelio, 2017, 1h44.
Les métamorphoses dérangent surtout ceux qui ne changent pas.
En devenant Marina, Daniel s'épanouit dans l'amour, mais aussi le chant, un monde où la voix transcende les frontières du genre, où le corps n'est plus que vibrations. Une femme fantastique raconte l'histoire d'un deuil empêché après celui d'une renaissance réussie. La mort d'Orlando, l'amant de Marina, contraint cette dernière à affronter le regard univoque d'autrui. En l'écartant du processus du deuil, la famille d'Orlando – son ex-femme, son fils… – cherche à faire de Marina un monstre. Tu es une "chimère", lui dit l'ex-femme d'Orlando. Un être composite, indécidable, flou. Marina devait aller voir avec Orlando les chutes d'Iguazzu, lieu où des cataractes déchaînées convergent – au lieu de cela, elle est prise dans la tempête des différences.
Confrontée à ce qu'elle perçoit comme une scandaleuse indétermination, la famille du défunt se sclérose dans une normalité frustrée – et c'est contre cette cécité que doit se battre Marina, elle qui a pourtant remporté le plus dur combat en changeant d'identité sexuelle. Le cinéaste chilien Sebastian Lelio filme Marina de façon claire et frontale, en cadrant subtilement sa détermination pour mieux souligner sa trajectoire. Scène magnifique où Marina affronte, en pleine rue, un vent violent, qu'elle pénètre en diagonal malgré tout, à contre-courant de tous les débris que celui-ci charrie. Daniela Vega, qui incarne Marina, offre en permanence son visage entier à la caméra, tandis que les autres ne semblent avoir qu'une obsession: savoir de quel sexe elle se chauffe. Ils veulent voir "le bas", alors que ce sont eux qui habitent le "bas", et sont incapables d'envol – là encore, en contrepoint, scène magique où Marina devient légère et multiple, filmée dans un carnaval de paillettes, changée en phénix.
Libérée des cendres de son identité imposée, Marina traverse chaque plan avec la force d'une évidence, en affrontant les pires chimères, celles pour qui il n'est d'autre mythologie que la norme. Oyez la bonne nouvelle: Wonder Woman est trans – et transcendante.
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