L’écrivain, à l’instar du
fromage, ne doit être ni trop mûr ni trop coulant. (S’il est très jeune,
mettez-le en avant lors du Salon, il partira comme et avec les petits pains du
jour.) Il est également fragile, alors ne le laissez pas trop longtemps dans
son coin, car il a tendance à aimer les vers, quel que soit leur nombre de
pieds, et vous n’avez pas envie de voir des vers avec des pieds, croyez-moi.
L’écrivain raffole des événements, qui le mettent en valeur et permettent de
souligner l’excellence de sa forme et la portée de son fumet. Offrez-lui donc
un plateau digne de ce nom et à la mesure de son renom. Un écrivain bien
présenté est un succès garanti. Sur une table en bois, il attire le regard –
vous pouvez même disposer autour de lui les quelques fruits de son travail. En
bonne compagnie, vous verrez, il fera de son mieux pour qu’on le prenne en
bonne part, et plutôt deux fois qu’une. Le libraire veillera toutefois à ne pas
écorcher son nom et sa croûte et à le servir avec autre chose que de l’eau
plate.
Mais avant d’en faire le plat de
résistance, il faut qu’il s’affine. C’est là bien souvent un rôle qui échoie
aux résidences, lesquelles sont nombreuses. Dans un cadre agréable, à l’abri
des bises médiatiques, dûment rémunéré, l’écrivain pourra enfin donner le
meilleur de lui-même et prouver si besoin est que le pain quotidien ne lui est
pas nuisible.
Pour le protéger, il convient
également de lui distiller les bonnes informations. Il a parfois la patte
molle, quelques précautions ne sont pas donc inutiles pour l’empêcher de se
décomposer sur place. Rappelez-lui qu’il a des droits, qu’il est fiscalement un
salarié et que s’il ne comprend rien à rien il peut toujours appeler le Motif
pour savoir si, en cas de litige – cette bactérie sournoise –, c’est râpé ou
fondu d’avance.
Si l’écrivain est friand de
formations, alors tant mieux, le Motif, une fois de plus, peut l’aider à
maîtriser la chaîne des étapes – caillage du manuscrit, égouttage des droits,
affinage de la promotion. D’un coup de spatule, vous serez
dirigé vers le bon garde-manger.
Pour l’apprécier à sa juste
valeur, dégustez-le à votre guise. Soit seul dans l’intimité de votre
garde-livre, soit généreusement entouré de ses semblables. Dans tous les cas,
gardez une poire pour la soif.
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(extrait de La Cuisine du Motif, rapport d'activité du Motif sous forme littéraro-culinaire, douze recettes au goût du jour bonjour, qu'on peut lire en ligne ici.)
j'aime bien quand des gens qui visiblement sont bourrés (le fromage sans pinard c'est moins goûtu !) de préjugés, de certitudes et condescendants, font de quelques exemples une généralité sans tenir compte des variables et des paramètres inconnus !!
RépondreSupprimerje suppose que l'auteur de ce camembert littéraire est content de lui... je lui conseillerais pourtant de sortir de sa cave ou de soulever le couvercle de sa cloche à fromages pour voir comment ça se passe dans le monde réel !!
Agnès Lambert, auteur hors plateau !
ta photo donne de l'appétit ^^
RépondreSupprimerLe respect des températures de conservation me font peur!!!!
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