A peine perpétré, le carnage niçois a été l'occasion pour la quasi totalité de la classe politique de brandir le spectre du terrorisme, comme si celui-ci ne pesait pas déjà assez lourd au-dessus des têtes. Sans la moindre information sur le responsable de ce massacre, sur ses intentions, en l'absence de la moindre revendication, hors toute analyse, et avec sous la dent le seul mot ô combien menaçant de "tunisien", les ténors du baril de poudre aux yeux ont entonné le refrain bien rodé du croisé récalcitrant.
Le sang n'avait pas séché sur la Promenade qu'était déjà exigé le prolongement de l'état d'urgence, dont l'efficacité n'est plus à prouver. Les parents et les proches des victimes n'avaient pas encore eu le temps de comprendre ce qui s'était passé que déjà les mots de "guerre" et "riposte" fusaient de la bouche des politiques, urbi et orbi. Et chacun, bien sûr, de se tirer dans les pattes. Comme si, quelque part dans leur inconscient poreux, nos gouvernants passés, présents et futurs guettaient, attendaient un drame – quel qu'il soit – pour justifier la vigipiratonnade ambiante.
Vingt-quatre heures après les faits, on ne sait toujours rien des motivations du coupable, sinon qu'il était enclin à la violence et fort peu religieux. Mais qu'importe. La douleur est là, exploitable à l'envi. La télévision a raclé bas, une fois de plus, puis a présenté de plates excuses, avant d'en remettre une couche. L'important était de parler sécurité, mesures de sécurité, sécurité des mesures.
On le sait aujourd'hui: l'application lancée par le ministère de l'Intérieur, baptisée SAIP (Système d'Alerte et d'Information des Populations), et censée alerter la population en cas d'attaque terroriste, n'a pas fonctionné. Mais l'application lancée par le ministère de la propagande censée alerter la population en cas de dysfonctionnement de l'application SAIP, elle, a rempli parfaitement son rôle. Les populations sont désormais dûment informées qu'information et alerte ne font plus qu'un.
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