Le problème – l'ennui, le profond ennui – avec les écrivains paranoïaques en manque de renom, c'est qu'à peine a-t-on écrit leur nom sur la page ou l'écran qu'ils gonflent déjà, telles des baudruches entendant le début de leur nom – bau… – et croyant y déceler une épithète louangeuse. Et à peine a-t-on entrepris de leur rabattre le caquet qu'ils y voient la confirmation de ce nœud, plus coulant que le fromage auquel s'apparente leur cerveau, où ils s'imaginent que l'on glisse leur tête. Aussi ne dira-t-on pas grand-chose finalement de l'article consacré par Richard Millet à Maylis de Kerangal, paru récemment dans le numéro 61 de la Revue Littéraire. Pas grand-chose à dire, en effet, puisque, une fois de plus, on y apprend ce qu'on savait: l'homme du ressentiment aime à remuer.
Donc, Millet remue. Et remue mollement dans les eaux attendues de ses détestations. Il arbore ses petits étendards fiévreux qui n'étonneront que les novices, enfilant les rôles honnis comme autant de gants moisis. D'abord le Sexiste, qualifiant Maylis de Kerangal de "Zola femelle", lui donnant du "Madame de", la traitant de "Babyliss de Kerangal". Puis le Raciste, crachant sur la "littérature française", visiblement abâtardie, qu'incarne selon lui Maylis de Kerangal et d'autres (en gros, les primés), afin de pouvoir mieux insulter les tenants de la littérature francophone, recourant à l'expression "attraction raciale" et rabâchant l'adjectif "blanc" (ou, "white"), même serti de guillemets. Enfin le Réac, fier et froissé, fustigeant en une même gerbe le post-modernisme, l'ultra-gauche, Foucault, Didi-Hubermann, les gender studies, etc. Surtout etc.
Sexiste, raciste, réac: ce sont là sans doute des termes un peu forts, et que cherche tant à décrocher ce petit persécuté Millet qu'on trouverait finalement généreux de l'en parer. Soit. Retirons-les. Il n'en a pas besoin, étant devenu, jusqu'au paroxysme du ridicule, dérapages inclus, la parodie de lui-même, comme si le fiel fascisant suffisait à faire acte de Bloy. Ça doit être ça le plus dur à vivre, dans le ressentiment. S'imaginer au sommet de la dénonciation et de la vérité, alors qu'on racle la cuvette en se torchant avec ses pages. Se vouloir fracasse et n'être que mélasse. Se croire polémiste quand on est juste taxidermiste. S'inventer blanc quand on n'est que gris. Se croire unique quand on progresse aux régionales.
toujours un régal de te lire!
RépondreSupprimerSi j'étais vous, je me méfierais. Ce type a l'air drôlement armé: "Richard Millet, qui voulut apprendre la littérature en combattant aux côtés des chrétiens du Liban [...] Richard Millet au service de la langue comme de son arme.. ("Israël depuis Beaufort" - Les Provinciales, 2015 -. Présentation de l'éditeur)".
RépondreSupprimerTu lui fais trop d'honneur avec ce billet...
RépondreSupprimerAlerte pourpre : ce site vient d'être piraté par Monsieur Prudhomme.
RépondreSupprimerLe Millet, c'est de la nourriture pour les serins en cage, non ?
RépondreSupprimertout autant que le billet suivant
RépondreSupprimeron s'en tape
mais bon, à défaut d'écrire.....
ouf ! cela fait du bien de remettre les pendus à leurre
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