Fin août prochain, la collection Lot49 publiera Le dilemme du prisonnier, de Richard Powers, traduit par Jean-Yves Pellegrin. On vous l'a dit, Powers est actuellement à Lyon, à la Villa Gillet, alors n'hésitez pas à aller l'écouter dialoguer. En attendant la sortie de son livre, en voici le début en avant-première intergalactique (bon, on n'a pas vraiment vérifié du côté du petit nuage de Magellan, mais bon…):
"Quelque part, mon père nous enseigne le nom des constellations. Nous sommes allongés dans le froid, dehors dans le jardin sombre, adossés au sol dur de novembre. Nous autres enfants nous répartissons sur son corps énorme comme autant de mouchoirs de rechange. Il ne sent pas notre poids. Mon père braque les six volts d’une lampe de poche à deux sous sur les trous percés dans la coquille noire qui nous entoure. Nous sommes couchés sur la terre glacée tandis que devant nous s’ouvre le manuel illustré du ciel hivernal. Les six volts du faisceau créent l’unique petit point chaud dans l’intégralité du monde.
"Mon père fait ce qu’il fait le mieux, la seule chose qu’il ait su faire toute sa vie. Il nous pose des colles, accable sa marmaille de questions. Où se trouve la ceinture d’Orion ? Quel est le nom latin de la Grande Ourse ? Qui connaît l’histoire des Gémeaux ? Combien fait une magnitude ?
"Il ne s’adresse à nous qu’en énigmes. Sortis des langes, nous apprenons à parler. Il nous met en garde contre le langage : « À quel moment une porte n’est-elle pas une porte ? » Nous grandissons, découvrons les alentours. Il est là, à nous interroger sur les points cardinaux. Nous tombons et nous faisons des bleus. Il transforme la meurtrissure en leçon sur les capillaires. Ce soir nous apprenons, dans le grand carré de Pégase, l’éloignement des choses. La solitude."
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