vendredi 11 mai 2012

Eleni Sikelianos: Dans la ménagerie du temps et de l'espace

Le mercredi 16 mai, à 19h, la librairie Charybde (129 rue de Charenton, 75012 Paris) aura le plaisir d'accueillir ELENI SIKELIANOS, de passage à Paris. En compagnie de ses traducteurs Claro et Béatrice Trotignon, l'écrivaine américaine nous parlera du poignant  Livre de Jon (Actes Sud), et de son magnifique Poème Californie (Editions Grèges). "Une occasion rare de rencontrer une auteur atypique, baignant depuis l'enfance dans une impressionnante multi-culture littéraire, et capable d'en extraire régulièrement de la force et du sens" (dixit Hugues Robert, un des libraires de Charybde, qui en parle également sur le site senscritique). On lira des extraits de son œuvre, on parlera de l'absolue nécessité de la poésie, on trinquera aux "étoiles ténébreuses, censées dispenser la nuit"…

Le Livre de Jon est un scrap-book poétique et mental, où les membres épars du père ont droit à une ultime charade, un anti-portrait fait d'éclats et de fils, où les souvenirs sont traités comme des pulsations, où le verbe ne cherche pas à dire mais à traverser, effleurer, secouer. Au cœur du deuil de l'exhaustive mémoire, l'auteur traque non pas le père mais son empreinte fracturée dans l'enfance et l'absence. Jon, comme autant de versions de lui-même, partagées ou inconciliables, distant à soi, à la fois tourbillon tourbillonnant à l'héro, rêveur impénitent, ludion fâché avec la permanence et la volonté, point devenu confetti dans la nouvelle parade géométrique orchestrée par Eleni Sikélianos. 

Le Poème Californie, dont une partie était déjà parue dans le recueil Du soleil, de l'histoire, de la vision, est un poème-monde dont la traductrice, Béatrice Trotignon a su nous rendre la dimension baroque et charnelle. Géographique par sa matière mais épique par son ambition, Le Poème Californie est un de ces livres inépuisables sur l'Amérique, comme le célèbre Mobile de Michel Butor, un livre bousculé et whitmanien, "libre et ondoyant", tout en cadences et scories, où plantes et bêtes ne cessent d'échanger leurs intensités:
"Instructions: Ecris la scène de la mort du personnage, le personnage
Californie, quelles seraient les pensées
du Personnage Californie, quelle
aigrette s'envolant
du lac, quel regret?"
(Eleni Sikelianos est l'arrière-petite fille du grand poète grec, Angelos Sikelianos. Elle est aussi l'épouse du romancier Laird Hunt, que publie Actes Sud.)

2 commentaires:

  1. Fan de toujours de Sikelianos, je serai (en faisant confiance au côté optimiste du futur du temps) à Charybde, pour elle, et pour ses traducteurs...

    "What are we doing here? All
    our movements and actions
    are helping or hindering
    the dead"

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  2. La cause des regards, c'est lui, qui installe, à chaque fois, sur la plage une tapisserie murale de Sétif dont le tissage
    décrit une fantasia, il délimite ainsi ton territoire d'enfant sur la plage, tu prends place sur le tapis qui te protège
    du sable, abritée sous le parasol en attendant sa permission d'aller te baigner dans la mer, l'élément où tu es le
    plus à l'aise.Tu as appris avec cette fantasia à installer, à lire une image et dessiner les vitesses.

    La Cause des portraits (Ko du jeu de Go, symbole infini des éditions P.O.L), c'est lui, le défunt dont il te reste
    une fantasia sur les plages et son addiction contre laquelle tu n'as rien pu mais au moins tu ne connaîtras jamais
    le coup de foudre, cet emportement qui te soumet à un autre ou une autre, tu en es incapable. Même très
    entourée, tu es seul(e), comme Virginia Woolf, au bord du l'étang. Tu n'as cessé d'écouter après le décès
    du défunt, La Passion selon Saint Jean de Bach dans une version très baroque et Take me into your skin,
    The Last Resort, de Trentemøller. Ombre, ensemble vide de ce qui n'est plus chair pour toi.

    Tu ne pourras pas aller à cette rencontre proposée et tu sais déjà que tu manqueras quelque chose, tu as, au
    même moment, un rendez-vous prévu depuis longtemps avec un "fond of abbey" qui a foi en l'Art et l'Histoire.

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