lundi 27 janvier 2014

Le livre en progrès

C’est toujours très compliqué de parler d’un livre en cours, pour la bonne raison qu’il se divise en deux moments : le livre que vous « rêvez » d’écrire – celui auquel vous pensez en permanence, qui transfigure dans les notes, les brouillons —:::— et l’autre livre, celui qu’il sera au final, quand vous aurez échoué du mieux que vous pouvez. Ce sont deux livres différents et décrire l’un ne parvient pas à rendre compte de l’autre. Disons néanmoins que le livre en cours sera un livre-dispositif, aux entités flottantes, anonymes, interlacé de motifs inconciliables, le tout convergeant dans deux possibilités narratives antinomiques, dont l’une serait, sous forme crypto-cataleptique… Hum, bon, comme on peut le constater, décrire le projet en cours est assez casse-gueule. Alors tentons une autre approche: ce sera l’histoire d’un vieil écrivain qui a connu le succès il y  a longtemps mais qui n’écrit plus et s'est isolé dans un prieuré à la campagne et il est devenu bougon et amer et refuse de voir ses enfants mais un jour il  reprend goût à la vie après avoir rencontré, à la pâtisserie locale, une jeune violoncelliste rousse d'origine sicilienne qui écrit une thèse sur les batraciens dans l'ancienne Egypte. Vu sous cet angle, c’est plus appétissant, non ? Mais bon, en fait, ça ne sera pas ça. Ça sera autre chose. Tout autre chose.

5 commentaires:

  1. Au contraire, pourquoi ne pas accepter de tenir un journal d'écriture avec ses contradictions, quel malaise révèle donc ce besoin de "définitif", du sans-faute illusoire.... A la relecture un journal de bord révèle un parcours avec ses points d'achoppement, ses échappées, ses repentirs - tous les méandres de l'écriture.

    RépondreSupprimer
  2. Au beau milieu d'un récit (de plusieurs même, me semble-t-il), Borges évoque, serein et moqueur, "ces choses qui auraient pu être autres", miroirs de ces possibles par définition et par essence interchangeables, fuyants, ambigus, souvent contradictoires...
    Tout est toujours "autre" en littérature, c'est même à quoi l'on reconnait celle digne de ce nom; le reste relève du Réel, c'est un tout autre problème, SON problème, pas celui de l'écrivain...

    RépondreSupprimer
  3. Alberto Manguel, qui en connaissait un rayon là-dessus, écrivit quelque part que "dans la lumière, nous lisons les inventions des autres; dans l'obscurité, nous inventons nos histoires, à nous."
    J'ignore (mais le sais-tu toi-même?) quelle est ton "obscurité", Claro, mais j'aime depuis longtemps ce qu'elle engendre, au point d'écrire dessus, nouée quelle est à la mienne, quelque chose qui n'aura peut-être pas de fin, mais eut déjà un début...

    RépondreSupprimer
  4. Notons qu'une 'tite apostrophe discrètement glissée entre "qu" et "elle" (avant-dernière ligne) m'aurait évité, toutes hontes bues, de m'exposer à la vindicte publique, comme cela fut le cas par le passé et le sera à nouveau à l'avenir...

    RépondreSupprimer
  5. Qu'en disent les éditions Grasset & Fasquelle? Claro:"Ahahah".

    RépondreSupprimer