Il y a une vingtaine d'années, l'écrivaine américaine Carole Diehl était jurée dans un concours de slam poétique. Deux très jeunes Latinos s'étant livrés à une performance assez "désobligeante" [derogatory…] envers les femmes (réduites à leurs organes génitaux, pour tout dire), Carole Diehl et une autre jurée, Denise Duhamel, décidèrent de ne pas voter. Elles estimaient que leur mission consistait à noter la qualité du travail, non son contenu, mais dans le cas présent le contenu leur paraissait inacceptable. La semaine suivante, Carole Diehl lut un poème destiné à renverser légèrement les perspectives. Ce poème s'intitule "Pour les hommes qui n'ont toujours pas compris". En voici la traduction — bonne lecture, les mecs :
"Et sitoutes les femmes étaient plus grandes et plus fortes que toiet se croyaient plus intelligentes
Et sic’étaient les femmes qui déclenchaient les guerres
Et sides tas d'amis à toi avaient été violés par des femmeset sans vaseline
Et sile policier de la routequi t'arrêtait sur l’échangeur du New Jerseyétait une femmeet portait une arme
Et sile fait d'avoir ses règlesétait la condition pour décrocher les boulots les mieux payés
Et si-->
l’attrait que tu exerces sur les femmes dépendaitde la taille de ton pénis
Et sichaque fois qu’une femme te voyaitelle sifflait et faisait des gestes saccadés avec les mains
Et si
les femmes faisaient toujours des blagues
sur la laideur des péniset le gout désagréable du sperme
Et situ devais expliquer ce qui cloche dans ta voitureà de grosses femmes suantes aux mains huileusesqui fixent ton entrejambedans un garage où tu es entourépar des affiches de types nus en érection
Et sides revues pour hommes publiaient des photosde gamins de quatorze ansavec des chaussettesfourrées dans leur jean au niveau de l’entrejambeet des articles du style« Comment savoir si votre femme est infidèle »ou« Ce que votre médecin ne vous dira pas sur votre prostate »ou« La vérité sur l’impuissance »
Et si
le médecin qui examinait ta prostate
était une femme
et t’appelait « mon chou »
Et si
tu ne pouvais pas t’enfuir
parce que le dress code de la boîte où tu bosses
exige que tu portes des chaussures
conçues pour t’empêcher de courir
Et si
après tout ça
les femmes voulaient encore
t’aimer."
Nous avons toutes fait de telles suppositions de temps en temps, seulement de temps en temps, nous avons d'autres centres d'intérêt. Et ce serait amusant de savoir ce que les hommes en pensent....
RépondreSupprimerVous utilisez le mot "écrivaine". Normal. Mais j'ai beau être une femme, je ne m'y fais pas, à cause des deux dernières syllabes. Quant à "l'auteure", le mot provoque en moi un mouvement de recul. C'est drôle comme nous sommes conditionnées.
RépondreSupprimerAh la fois, on ne peut pas dire que "écri-vain" se termine mieux…
SupprimerLes gens ne sont jamais contents. Vous auriez écrit écrivain qu'il y aurait eu quelqu'unE d'autre pour chialer. Au Québec les noms sont féminisés depuis très longtemps, vous vous y ferez à la longue, Anonyme.
SupprimerEnvoyons-nous donc des "Ecritaures" dans la face! Ca nous évitera, devenus mi-hommes, mi-bêtes de nous conditionner en simplement sexualisés. Et vexons-nous en nous lançant à la figure des "Autevains"
RépondreSupprimerquand nous trouverons des plumes mauvaises! Lol!
J'aime beaucoup...
RépondreSupprimerJe jette un oeil à mon petit coin littérature : j'y vois tous les David Foster Wallace, une bonne partie des Thomas Pynchon, tous les William Gaddis, tous les Gilbert Sorrentino, tous les Stanley Elkin, il y aussi un paquet de Roberto Bolaño, de William Gass, je commence à m'inquiéter et je ne vais pas lister ceux dont il n'y a qu'un ou deux romans.
RépondreSupprimerCherchons les auteures (autrice serait plus juste, il me semble ?). Je vois Goliarda Sapienza, il y en a 3, mais ils sont un peu à part, pire : 2 sur 3 m'ont été offerts. Je vois, je vois... Monique Wittig, mais j'ai dû tourner la tête ! Sa fiction est rangée avec ses écrits théoriques.
Franchement, comme on ne peut pas tout lire et qu'il faut bien choisir, je vais me résoudre à écarter tous les autres "grands" en attente (la liste est longue, elle aussi), et je vais chercher du côté des "grandes".
Pouvez-vous m'aider, Claro ? Sans vous et quelques autres, je n'aurais sûrement pas lu tous les "grands" en question (ni n'aurais connaissance de tous ceux que je souhaite lire un jour). Où sont les "grandes" ? Et, oui, je regrette d'avoir à le demander.
pour vous répondre: Toni Morrison (Beloved, Jazz), Kathy Acker (Don Quixote, A Novel), Susan Sontag (essais variés, un journal en 3 tomes, dont "As Consciousness is Harnessed to Flesh (le vol.II)), Donna Tartt (The Secret History), Flannery O'Connor (Complete Short Stories), Sylvia Plath (The Jar Bell, Ariel), Elena Ferrante (Les Jours de mon abandon), Denise Noël (Maryse (roman québecois)), ça vous fait déjà 8 noms, et une dizaine de titres. Essayez, aussi, Elfriede Jelinek (La Pianiste, Lust), pour voir... Signé: Un lecteur
SupprimerMerci pour cette traduction !
RépondreSupprimerMais... questions faussement naïves : qu'est-ce que la mention de l'origine ethnique des deux jeunes gens ("Latino") apporte à la compréhension du sexisme dans la chanson ? est-ce que cette écrivain/e WASP ressent autant d'indignation face à des Léo Ferré, Serge Gainsbourg, ou autres équivalents états-uniens ?
Et si
Le blanc de ta peau
Était toujours susceptible
D'être un détail pertinent
Pour parler de ta misogynie ?
Bref, on l'auras compris, déconstruction du sexe et déconstruction de la race, même combat.
Cool! J'ai bien ri !
RépondreSupprimer@ Ben Les auteurs femmes, il y en a, mais on n'en parle toujours moins que des hommes! ;-) Quelques noms parmi bien d'autres : Carson McCullers, Eudora Welty, Margaret Atwood, Mavis Galand, Toni Morrison, Gloria Naylor, Kathy Acker, Jhumpa Lahiri, Edwige Dandicat, Kiran Desai, Alice Munro ;-) ...
La liste est trop longue ;-)
Réponse pertinente Claro! Bien sûr vous avez raison. Seulement le mot écrivain, nous l'avons dans l'oreille depuis notre enfance. Et quand j'étais en classe de 1ère, mon professeur de français (une femme) parlait de Simone de Beauvoir comme d'un écrivain. Si je fais l'effort de parler autrement, c'est comme si je m'appliquais une censure. Je trouve que Maxime n'a pas tort.
RépondreSupprimerEn allemand (je ne sais pas dans d'autres langues, mais il doit y en avoir), le problème du féminin ne se pose pas
RépondreSupprimerEt si
le médecin qui examinait ta prostate
était une femme
et t’appelait « mon chou »
et si le titre du billet avait repris sans l'édulcorer la question posée par le poème ?
@lebaiserdesmouches merci pour cette liste d'auteures que je vais découvrir (enfin, toutes ne me sont pas inconnues !).
RépondreSupprimer@Je-Me-Moi, Inc, merci à vous également, et là aussi, j'en connais quelques-unes.
Ce que j'essayais de dire, plutôt, c'est que si l'on me demandait de citer, mettons, 10 ou 15 auteur.e.s en littérature, comme ça, incontournables (et, affinons, en littérature américaine puisque c'est quand même une spécialité par ici), je ne citerais que des hommes.
Et je le déplore vraiment. Et j'aimerais changer ça à l'avenir.
Et vous, Claro ?
Et vous, lecteurs et lectrices de ce blog ?
Si vous deviez citer 10 ou 15 auteur.e.s ?
Je sais que c'est toujours un peu bête ce genre de liste. Mais on a tous un peu nos préféré.e.s, non ?
Bon et bien, combien d'auteurEs trouvera-t-on dans cette petite liste à la volée ??
Selma Lagerlöf, Nancy Houston, Hoda Barakat, Catherine Dufour, Joyce Carol Oates, Emily Brontë et ses soeurs, Pearl Buck, Doris Lessing, Anaïs Nin. il y en a plein d'autres, malheureusement, les écrivains sont toujours plus visibles que les écrivaines, c'est pour cela qu'à mon grand désarroi, je ne puis en citer quinze sans chercher sur Google. J'aime particulièrement Catherine Dufour, c'est de la science-fiction de très haute volée, d'une grande qualité littéraire - il faut dire que la dame en question écrit depuis l'âge de sept ans. Sinon, eh oui, comme j'écris moi aussi mais ne suis guère connue, je me cite moi-même : Ann Quark (seulement sur le Net pour l'instant). Au diable la modestie ! :)
RépondreSupprimerGeorge Eliot, Kate Chopin, Emily Bronte, Edith Wharton.
RépondreSupprimerThe best world in the world !
RépondreSupprimerje rajoute Ursula Le Guin
RépondreSupprimerRosa Luxembourg
RépondreSupprimerJe vous conseille vivement, poèmes sublimes http://archet.net/ebooks/sirventes.pdf
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