Ah, je vois que vous aimez les titres longs. Eh bien, ça tombe bien, le Clavier Cannibale peut vous conseiller quelques livres qui, pour ce qui est des manières titulaires (comme disent les universitaires), ne sont pas en reste, comme par exemple: Ma mère, musicienne, est morte de maladie maligne à minuit, mardi à mercredi, au milieu du mois de mai mille 977 au mouroir memorial à Manhattan de Louis Wolfson, ou Les Grandes perturbations surviennent dans les régions où l'atmosphère est d'ordinaire instable de Voituriez Tancrède, ou encore Des êtres se rencontrent et une douce musique s'élève dans leurs cœurs de Jens August Schade. Je vous épargne les titres les plus longs de films, qui eux sont pléthore, et me contenterai d'en citer un qui vaut le détour: Night of the Day of the Dawn of the Son of the Bride of the Return of the Revenge of the Terror of the Attack of the Evil, Mutan, de James Riffel (je ne l'ai pas encore, vu mais bon, rien ne presse je crois).
Toutefois, il semblerait que ce soit Emmanuel Adely qui s'apprête à battre cet improbable record avec son livre à paraître en janvier prochain aux éditions Inculte. En effet, ce court texte – staccato, performatif – qui prend pour pivot narratif le soldat américain ayant abattu Ben Laden ("Il n’est pas argentin il est américain il n’est pas bélizien il est américain il n’est pas bolivien il n’est pas brésilien il n’est pas canadien il n’est pas chilien il n’est pas colombien il n’est pas costaricien il n’est pas équatorien il est états-unien il est américain lui / il est blanc il est américain il a les cheveux châtains il est américain il a des lunettes de soleil Prada (350 $)" s'intitule tout simplement:
La très bouleversante confessionde l’homme qui a abattu le plus grandfils de pute que la terre ait portéou qui lui a tiré dessus le premierou qui lui a tiré dessus le secondou qui est le premier à l’avoir vu mortou qui est celui qui dans l’hélicoptères’est assis sur son cadavreou qui a tout inventé pouravoir une histoire à raconter.
Et d'après ce qu'on en a lu jusqu'ici, ce livre est aussi percutant que son titre est long (on vous en cause au janvier, quand on sera revenu de notre spa de luxe en Bolivie où on compte passer sa journée à lire des notices nécrologiques). Voilà, nous sommes à peu près jeudi et il est fort probable que nous restions encore quelque temps dans l'irréalité immédiate.
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Ill. René-Jaques (René Giton), Cirque Médrano, Paris, 1946
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