Comme son nom ne l’indique pas,
le « michel-ange à la sanguine » est un simple marbré à la ricotta et
à la betterave. Mais si vous l’appelez « marbré à la ricotta et à la
betterave », vous risquez de perdre un peu de magie. Or vous ne voulez pas
perdre en magie ce que vous gagnerez en calories – donc, jouez-la carrare &
Picasso. Pour la ricotta, comptez un bon quart de kilos, ou 250g, ou une
demi-livre, peu importe, ce qui compte c’est qu’elle soit chère, donc achetée
chez un traiteur italien, où elle est vendue dans un écrin au prix du diamant.
Mélanger la ricotta à des herbes. Bon, en cuisine, quand on parle d’herbes, il
va de soi qu’on ne vous demande pas d’arracher une touffe de gazon dans le
square le plus proche. Ce n’est certes jamais précisé mais cela va de soi.
Donc, des herbes : du persil plat et de la ciboulette. La ciboulette est
la seule herbe qui pousse de haut en bas, mais ça personne hélas n’ose le dire,
car on ne vous croirait pas. C’est également la seule herbe avec laquelle on
puisse jouer au mikado et perdre systématiquement. Ajoutez également de l’ail
en prenant bien soin d’ôter le germe. Si on l’a appelé germe, c’est justement
pour ce que vous n’ayez pas envie de le garder, soyez logiques que diable.
Mettez aussi une poignée de roquette, 20 noisettes torréfiées (mais personne ne
viendra contrôler qu’elles sont torréfiées, rassurez-vous) et touillez le tout
avec de l’huile d’olive, du sel, du poivre et, pourquoi pas, un pépin de
citron, il y aura toujours un invité pour s’exclamer « J’ai la
fève ! », ça fait plaisir, ça met un peu d’ambiance et ça ne coûte rien. Maintenant, pelez votre
betterave (cuite, n’est-ce pas, nous ne sommes plus des barbares), coupez-là en
fines lamelles (la lamelle est à la tranche ce que la poésie est au roman),
renoncez à faire partir la couleur rouge violacé dont sont désormais teintes
vos mains, et alternez lamelles de betterave et couches de ricotta aux herbes.
L’impression, une fois la chose servie, dépendra de votre habileté. Soit ça
ressemblera à un vieux cœur malade ramassé dans la sciure soit ça ressemblera à
un michel-ange à la sanguine. Une recette, comme un mode d’emploi, n’est pas un
visa pour la gloire. Tenez-le-vous pour écrit.
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Texte paru in La cuisine du Motif, rapport d'activité 2011
♥
RépondreSupprimerJ'ai tous les ingrédients dans le frigo (sauf les noisettes...), je teste ce soir. :) Et en attendant, je pense que je vais me régaler de lire cette cuisine du Motif. L'idée est excellente !
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