lundi 8 juin 2015

Crash-test: extrait

Pour tous ceux et toutes celles qui suivent le Clavier Cannibale, avant ma oisive retraite estivale impénitent prévue fin juin, voici un extrait de mon prochain livre, Crash-test, à paraître le 19 août aux éditions Actes Sud :::


                                     [CRASH-TEST # 0]

Au commencement était l’accident. Il le sait, l’a toujours su, et ce depuis sa naissance dans les entrailles d’une clinique d’abattage où à toute heure du jour et de la nuit, sous des traînées de néons, les ventres béaient et se contractaient au rythme du sang pulsé, les matrices saturant l’air d’ondes et de cris qu’aussitôt recrachés les avortons aspiraient goulûment, leurs yeux d’agoutis brûlés par l’incandescence des lampes, avant d’être secoués, rincés, palpés, intubés pour certains, cajolés pour d’autres, carambolés de salle en salle dans l’urgence de leur salvation ou bien chrysalidés dans du linge empestant le dakin, la scène se répétant inexorablement tandis qu’au- dehors, là où vivre était devenu coutume et châtiment, hurlaient les sirènes, celles des ambulances piaffant au seuil des urgences, et celles de la ville célébrant une fois par mois la possibilité du chaos.

9 commentaires:

  1. Un très grand livre dont je n’aurai pas le temps de faire plus ample critique avant de partir pour Toronto et l’Ontario.
    « Vilnius Poker » de Ričardas Gavelis (Monsieur Toussaint Louverture) traduit du lituanien par Margarita Leborgne, 544 p.
    Il y a 3-4 ans, il n’était pas évident de trouver un traducteur du lituanien en français. J’avais alors indiqué qu’il existait un lycée français à Vilnius, mais il s’est trouvé une traductrice lituanienne qui s’est fixée en Bretagne où elle est maintenant professeur de français. Pas évident non plus de se faire une idée sur les livres de Ričardas Gavelis, mort en 02, et dont « Vilnius Poker » n’a été traduit en anglais qu’en 09 seulement. Et pourtant les critiques positives abondent (The Believer, Bookslut) avec des références à J. Joyce ou F. Kafka (excusez du peu).
    Le livre est construit suivant quatre parties (de plus en plus courtes) avec chacune son narrateur. Vytautas Vargalis est bibliothécaire, occupé ( ?) à la confection d’un catalogue informatisé à vocation de n’être jamais consulté. Il est aussi rescapé des camps de travail, où il a été torturé (référence à Stadniukas, « un salopard de Russe du NKVD »). Son meilleur ami, génie mathématicien, jazzman atonal et plus que fantasque, Gédiminas Riauba meurt en début du livre. Il est amoureux de Lolita Banys-Žilys, femme fatale, mais au passé plus que trouble (est ce que son père était colonel du KGB, cordonnier, ou professeur d’histoire ?). Cela occupe les 340 premières pages du livre.
    Son collègue Martynas Poška, fera la narration de la seconde partie. Et Stéfania Monkevič, brave « fille du pays » terminera l’épisode « humain ». La dernière partie (34 p.) nous est racontée par Gédiminas Riauba, réincarné en chien philosophe sous les traits de Jagellon, grand duc qui fondera la dynastie régnante au XIII siècle, dont on reconstruit actuellement le château à Vilnius.
    Tout cela est fort beau, mais ne fait pas un roman. Il faut y ajouter les kanuk’ai, que Vytautas nomme plus simplement Eux ou encore Ils. Ces créatures peuvent prendre n’importe quelle apparence et dévorent les consciences des humains, les réduisant au néant. Néantisation des hommes, des pensées du cœur… Lente déstructuration des habitants, de la ville et du pays qui fait suite aux multiples occupations (polonais, juifs, allemands, russes) que le pays a subi, après son âge d’or depuis 1290 et qui se termine vers 1792, soit cinq siècles durant lesquels ce pays grand comme la Belgique aura sa littérature avec Martynas Mažvydas et Oscar Vladislas de Lubicz-Milosz (le cousin du polonais Czeslaw Milosz), sa peinture avec Mikalojus Konstantinas Ciurlionis, et bien sûr gardera sa langue (balte et non finno-ougrienne comme l’estonien). C’est alors le royaume de la Vistule, pays de l’aigle blanc. Il va se faire progressivement dépecer par les trois aigles noirs que sont l’Autriche, la Prusse et la Russie. Restent les « pigeons gris et crasseux de Vilnius ». Une grande partie de la littérature actuelle de Lituanie, mais aussi de Lettonie et d’Estonie, aborde ces thèmes du déclin et des invasions-soumissions des pays Baltes au cours des temps. Lire « La Saga de Youza » par Youozas Baltouchis (Alinéa, 90) ou « Des âmes dans le brouillard » par Loreta Macianskaité (Presses Universitaires de Caen, 03). D’où leur espoir actuel de se rattacher a l’Union Européenne (en brulant parfois les étapes économiques). On voyait encore les récoltes de foin coupé à la faux et à cheval il y a quelques années.

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  2. la suite de Vilnius Poker

    Le livre est paru en 87, donc avant la fin de l’occupation et domination soviétique. Il est évident que cette période qui fait suite à l’occupation polonaise et allemande, n’est pas la période la plus gaie de la Lituanie. Je me souviens avec émotion de récits qu’un autre Gédiminas, (de même prénom et lui aussi professeur scientifique), m’a fait sur la libération de Vilnius, avec des mouvements de chars soviétiques contre une population à pied et sans arme. (Trop de pudeur alors sur la période soviétique et sa répression implacable. Emotion et volonté d’oublier les massacres de juifs de la période allemande). Cette occupation de territoires et de consciences Ričardas Gavelis l’a sans doute aussi vécue, sous quels traits ? Gédiminas sans doute, mais cela en ferait un livre prémonitoire. Dans la peau du chien (l’allusion aux odeurs) alors ?
    Le coté arbitraire et kafkaïen de la gestion du temps et des hommes y est décrit par les quatre narrateurs. Scènes de violence parfois insoutenable (cf les séances de torture au début du livre), ou scènes plus ou moins torrides (il faut évacuer le stress), avec les différentes stratégies élaborées pour survivre ou résister. Mais au fil des pages, c’est également Vilnius, la ville en soi, qui apparait comme personnage important du livre. C’est la ville avec ses monuments (la tour Gédiminas et le château que l’on reconstruit) ou ses dynasties (Gédiminas et son cousin Vytautas, les Jagellon) ou de ses célébrités (Martynas Mažvydas, écrivain du XVeme), toute le passé historique de la Lituanie avant qu’elle ne soit découpée entre les pays voisins. On constate que les noms des différents protagonistes ne sont pas choisis au hasard. Seul le chien sait reconnaître les gens. Et dans un matin blafard de Vilnius, le chien décrit la vie : « La vie à Vilnius, c’est une immense partie de poker jouée par des fous…. C’est un poker sans but ni logique… Ici, tout le monde joue mais personne ne remporte la mise ». On dirait du Shakespeare. Et finalement « Les chiens ne font aucune différence entre les rêves et la réalité ». Peut être que les hommes (lituaniens) ne la font pas non plus.
    Assez bizarrement, cette dernière partie me rappelle Léo Ferré
    « Nous sommes des chiens
    Et les chiens quand ils sentent la compagnie
    Ils se dérangent et on leur fout la paix
    Nous voulons la Paix des Chiens »


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  3. Bon, ça démarre bien... une chance d'avoir la suite avant le 19 août ?

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    1. pourquoi le 19 aout ?
      sortie de A Naked Singularity ? (oui, mais il y en a plus long)
      et en prime Personae du meme auteur

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  4. Jean-Louis vous commencez à devenir chiant... pourquoi ne pas ouvrir votre propre blog ?

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    1. Maxime LILENFELD8 juin 2015 à 13:28

      Vous êtes le videur de celui-ci vous!?

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  5. C'est bien tout ça, mais ça serait encore mieux si ça se passait sur votre propre blog, M. jean louis.

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  6. La suite.... allez, encore un peu...

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  7. Dans les entrailles d'une clinique.... et celles de sa mère ? On en fait quoi.
    Une ambulance qui piaffe...mdr... C'est vrai qu'il y a des chevaux sous le capot
    Vivre coutume et châtiment... !!!
    Dites... il est pas un peu comique le Claro, comment les mêmes fautes que celles qu'il reproche aux autres écrivains. pas facile d'écrire mon gars !!!

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