Ça s'est passé à la mi-novembre dernier. Ce soir-là, une jeune femme – D – ferme le bar La Mutinerie, un bar queer et féministe. Elle passe tranquillement le balai devant l'établissement. Quelques clients s'attardent et commencent à l'agresser verbalement, avec toute cette finesse virile que deux mojitos suffisent à déclencher chez le mâle persuadé que serveuse = pute. D leur demande de partir, ils refusent, l'un d'eux lui fait un pied chassé au genou gauche mais D sait se défendre, hop, coup de boule. Puis elle s'enferme dans le bar. Elle ne peut porter plainte, ignorant l'identité de son agresseur. Deux jours plus tard, un flic se présente chez elle. C'est l'agresseur qui a porté plainte. Résultat, c'est D qui écope d'une peine, la légitime défense n'ayant pas été reconnue. Lors du procès, des personnes sont venues soutenir D. Mais après le verdict, les réactions n'ont pas été de l'ordre de Minerve, ainsi que D le raconte :
«Après le verdict, les personnes venues me soutenir ont protesté dans la salle d’audience, poursuit D. Elles ont été évacuées avec force et violence. Après ça, nous nous sommes dirigées vers une sortie dans le calme, mais les forces de l’ordre nous attendaient. Nous avons été encerclées et retenues deux heures sur place. Ils ont tenu à vérifier nos identités après des accusations d’outrage à agent et dégradations de matériel. Des bancs ont été cassés lors de l’évacuation par la police. Nous avons été emmenées au commissariat des Halles.»
Les personnes qui ont tenté de faire entendre un autre son de cloche que celui du plaignant (l'agresseur agressé…) se sont fendus d'un communiqué :
«Dans un contexte de recrudescence des violences contre les femmes, les trans’ et les gouines (agressions physiques suite à des démonstrations d’affection, insultes, attouchements dans les transports, remarques graveleuses… à la fois dans des espaces privés et publics), une fois de plus, la justice protège les agresseurs et condamne les femmes qui se défendent ou dénoncent l’impunité et la justice patriarcale. Quel signe nous est ainsi envoyé lorsque nous décidons de nous défendre face aux agressions verbales, physiques, menaces de viol, perpétrées par des hommes cisgenres? La logique de la “réponse proportionnée” devrait donc nous amener à nous contenter de dire “non merci bisous” face aux menaces symboliques et physiques que nous subissons? La victime de l’agression, pour s’être défendue sans ambiguïté et sans s’excuser, a déjà dû payer 2400 euros de frais d’avocat, a écopé de 5 mois avec sursis et risque de devoir débourser une somme considérable à cause d’une société pro-viol secondée de sa police patriarcale, qui ne reconnait pas aux femmes, aux gouines, aux trans’, la légitimité de se défendre contre les agressions sexistes constantes dans l’espace public comme dans la sphère privée.»
Apparemment, on ne peut pas vraiment compter sur la justice pour régler des délits sexistes. Il faut désormais recourir à la ruse, genre, se faire insulter, puis riposter, afin d'être inculpée, puis jugée et condamnée – et seulement alors on a une occasion (mais brève) de protester au sein même du temple de l'équité casquée. Ça peut paraître un peu fastidieux mais ça marche à tous les coups. Parce que se faire insulter est très simple. Il suffit d'être une fille – si vous bossez dans un bar et que vous êtes lesbienne, c'est mieux. Prenez un balai ! Hop! Abracadabra! Et voilà! C'est vous qui donnez maintenant, et sans rien faire, l'impression de provoquer le mâle. Je pense qu'il est temps d'ouvrir des bars lesbiens réservés uniquement aux mâles, histoire d'apprendre à ces derniers la solitude du connard du fond.
la solitude du connard du fond....
RépondreSupprimerun connard reste un connard (qu'il soit au fond - et buté - ou dans un but - et fondu-)
et comme me disait un ami (qui avait beaucoup vécu) "un jeune con ne fera jamais qu'un vieux con"
Vous êtes chiant, Jean-Louis
RépondreSupprimerOn opprime dehors ET dedans, à La Mutinerie : http://www.etatdexception.net/?p=6089
RépondreSupprimerLes femmes sont tellement victimes du système judiciaire français qu'on teste 500 élèves et professeurs hommes lorsque l'une d'entre elle se fait violer. Quelle oppression systémique, mes aïeux.
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