Au-delà du drame humain, à moins
que ce ne soit en son épicentre même, le mobile de l’homme qui a tiré sur la
foule à Las Vegas semble fonctionner comme piège en tenaille. D’un côté, Daech,
qui en réclame la paternité. De l’autre, deux camps : ceux qui « aimeraient »
que Daech ait piloté ce massacre, car cela alimenterait leur moulin
islamophobe, et ceux qui « prient » pour que Daech n’y soit pour rien
– parce qu’ils savent qu’il n’est pas besoin d’être terroriste pour tuer, qu’il
suffit d’avoir des armes et d’être fêlé. Etrange situation où les uns appellent
de tous leurs fantasmes la confirmation de leurs peurs, ne laissant aux autres qu’une
option : se rassurer en se disant que la folie humaine n’a pas besoin d’avoir
la guerre sainte comme objectif pour presser sur la détente.
Bref, une sorte de pari pascalien made in Las Vegas. La roulette du cauchemar. Si je parie que Daech existe (derrière le massacre de Las
Vegas), et si Daech existe vraiment (derrière le massacre de Las Vegas), alors
j’ai gagné – mais quoi ? la preuve que mes peurs sont fondées? que seul
Daech peut être le créateur de ce nouveau monde? Si Daech n’existe pas
(derrière le massacre de Las Vegas), mais que j’ai parié sur son existence, alors
je ne perds rien – car entretemps, bien sûr, la rumeur du contraire s’est
répandue et rien ne l’effacera. En revanche, si je parie que Daech n’existe pas
(derrière le massacre de Las Vegas), et que Daech en fait existe (derrière le
massacre de Las Vegas), alors je perds gros : je serai désigné comme naïf
ou aveugle, voire pire. Mais si je parie que Daech n’existe pas (derrière le
massacre de Las Vegas) et qu’il est prouvé que Daech n’existe pas (derrière le
massacre de Las Vegas), alors je gagne – mais quoi ? Le droit de penser
que l’homme est assez fou pour agir follement sans obéir aux consignes d’autres
fous ?
"Il faut nécessairement choisir", écrivait Pascal. Pas si sûr. Car dans les deux cas, hélas, il y a fort à parier que
nous soyons enfermés en enfer pour l’éternité…
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