J'ai vécu plus de quinze ans dans le Val-de-Marne, à Chevilly-Larue, plus exactement, pas très loin d'Arcueil, donc, et ce sans savoir, pauvre de moi, qu'il y avait à Arcueil un cimetière et que, dans ce cimetière, reposait la dépouille d'Erik Satie. Mais maintenant je comprends mieux. Oui, je comprends mieux, car je me dis que Satie, même décomposé et rongé par les vers, devait continuer d'émettre des sortes d'ondes invisibles mais puissantes, porteuses d'étrange vibrations minuscules, elles-mêmes constituées de molécules subversives. A mon insu, donc, j'ai dû être contaminé par leur sourde diffusion dans l'atmosphère. Quelque chose de gymnopédique a dû m'emberlificouiller la tête.
Pourquoi je vous raconte tout ça? Oh, mais c'est très simple: je viens d'apprendre qu'Erik Satie était un "hypocrite", un "lâche", un "médiocre", un "illuminé". J'avais cru alors naïvement jusqu'ici que c'était un compositeur génial. Il n'en était rien. Heureusement, grâce à Denis Truffaut, la vérité a éclaté.
Qui est Denis Truffaut? C'est un conseiller Front National, qui vient de s'opposer à l'attribution d'un budget visant à commémorer Satie, qu'il traite en fin connaisseur "de membre de parti communiste alcoolique". Oui, Satie, outre un hypocrite, un lâche, un médiocre et un illuminé, était rouge et bourré. La chose aurait pu passer inaperçue sans Denis Truffaut, jeune et vigilant élu FN qui nous rappelle, si besoin est, que "l'art dégénéré" n'a pas disparu, même 80 ans après l'exposition que lui consacrèrent les Nazis en 1937 (deux millions de visiteurs…). Je ne sais pas trop quelle musique écoute ce mélomane averti de Denis Truffaut. Sans doutes les œuvres pour bottes cirées de Vivleu Padloi…
Hélas, Denis Truffaut, malgré sa grande connaissance de l'œuvre et de la vie d'Erik Satie, ne semble pas connaître cette phrase du compositeur, pourtant expressément écrite à son intention, pourrait-on croire:
"Il faut éviter qu'une idée de derrière la tête ne vous descende dans le derrière."
Si les élus se mettent à chercher dans la vie des cronopes les habitudes mauvaises cachées dans l'ourlet de leur existence comme l'usage de drogues, alcool, recours aux prostituées et autres fantaisies peu avouables accompagnées d'une cohorte de maladies qui ont réussi à écourter ces hommes sans amoindrir leur trace créative, ça va faire un grand vide pour nous inviter lors des journées du patrimoine à visiter cloîtres et couvents dans un silence de chartreux. L'épuration des bibliothèques pourra servir à créer de nouveaux emplois d'attachés anti-culturels, débarrasser les cimaises et remiser les tableaux en réserve occupera l'espace d'emplois d'utilité, la grande censure orchestrée sous ce prétexte mènera à parcourir les siècles à la recherche d'une perfection dont il faudra examiner l'exigence.
RépondreSupprimerles cons, c'est à ça qu'on les reconnait (Michel Audiard)
RépondreSupprimerN'est-il pas réconfortant en fin de compte qu'un aussi sinistre personnage déteste Satie ?
RépondreSupprimerLike! le sourire du lèche… "derrière la tête ne vous descende dans le derrière."
RépondreSupprimerSimple merci Claro de rester vigilant.
Le diable est dans les détails, certains détaillés plus que d'autres.
J'imagine, s'il avait été bordelais, le gars, ce qu'il aurait pu sortir à propos de Pierre Molinier... hé bé. Sinon, je ne peux que conseiller les "Mémoires d'un amnésique" (Ombres)ainsi que les Gnossiennes, of course...
RépondreSupprimerLe petit Truffaud n'a sûrement pas lu Lucien Rebatet, mais par une comique contamination, il partage deux ou trois de ses épithètes avec ce brillant musicologue qui fut aussi, c'est drôle, si collabo qu'il frisa la fusillade.
RépondreSupprimerAu front ...
RépondreSupprimerCrépuscule matinal …
Le soleil s'est levé de bon matin et de bonne humeur, mais le temps est préhistorique, et à l'orage.
Sur le bord du fleuve, un vieux palétuvier lave ses racines, répugnantes de saleté.
Il avait l'air d'un bon type, mais ne nous y fions pas, il va peut être brûler nos récoltes musicales ainsi que nos heures séculaires et instantanées.
Désespoir agréable ? … non ! Airs à faire fuir, pièces froides, affolements granitiques, aperçus désagréables, menus propos enfantins, embryons (de pensées ) desséchées,
Monsieur, munissez vous de clairvoyance
conseillez vous soigneusement
postulez en vous même, du bout de votre pensée, courageusement facile et complaisamment solitaire, ( nous l'espérons ... )
Mon cœur a froid dans le dos !
L'on vous fera monsieur, dire une messe … des pauvres ( d'esprit.)
Avec un grand oubli du présent , le génie vous avait oublié, mais vous regarde désormais d'un mauvais œil … un œil de verre …
Prélude flasque pour un chien, mais véritables pensées d'ameublement …
Baissez le rideau, il n'y aura pas de rappel !
Quelle est cette nausée qui me saisit à la vision de ce jeune monsieur si sûr de ses putrides certitudes ?...
RépondreSupprimeroui la nausée, monsieur.
RépondreSupprimerCe jeune militant sans remords , sans oreille , sans écoute.
merci Satie , génial musicien, magnifique personnage ;
capital et mondial.
oui la la nausée
oui la nausée.
RépondreSupprimervive la note suspendue.
la beauté musical de l'instant
le rythme du battement de l'eau
merci Satie
Quand la morosité pointe son nez, je pointe le mien chez CCC. Et bien je ne suis jamais déçu.
RépondreSupprimerAvec ce Truffaut-là, et sa tronche d'effigie de chamboule-tout, on tient pour l'avenir une pépinière de sujets quasi académiques.
Merci Claro, ces gammes défoulatoires sont autant prophylactiques que curatives.
François (pas Truffaut)