[Pendant l'été, le Clavier
fouille dans ses archives et vous ressort des posts anciens, parce
qu'on ne sait jamais. Aujourd'hui, ce post du 23 septembre 2010…]
Michel Houellebecq, l’écrivain que le monde entier nous envie, s’impose, avec La Carte et le Territoire,
comme notre Balzac, et son roman s’impose, dans toute son ampleur et
son désespoir, comme le grand roman de la rentrée – oui, enfin un roman
sur la littérature quand on s’y attelle sérieusement (« Il quitta son pantalon et son pull », p.18). Héros de la littérature contemporaine, mais également l’un des grands observateurs de notre époque (« c’est bien peu de chose, quand même, les relations humaines », p.23), Michel Houellebecq est le romancier le plus intéressant aujourd’hui (« il semblait que les secondes, et même les minutes, s’écoulassent avec une foudroyante rapidité », p. 25), un ethnologue percutant de notre modernité (« l’insatisfaction le reprit, plus amère encore », p. 29 ; « beaucoup de régions, pour ce qu’il en savait, présentaient un intérêt réel », p. 95)), doublé d’un témoin à l’œil aiguisé de ce début du XXIème siècle (« La
beauté des fleurs est triste parce que les fleurs sont fragiles, et
destinées à la mort, comme toute chose sur Terre bien sûr mais elles
toute particulièrement », p. 36). Faisant montre de modestie et de sobriété, l’écrivain a du génie (« Les journées étaient belles et uniformément chaudes », p. 42 ; « son
cerveau ne parvenait à formuler aucune pensée hormis quand même la
surprise de ce que l’image de ses anciens camarades ait aussi
complètement disparu de sa mémoire », p. 64), et ce génie c’est sa capacité à saisir en même temps l’écume et le sens de notre époque (« ses jambes étaient incroyablement longues et fines », p. 70).
Souvent hilarant, son portrait de lui-même nous rappelle que lorsqu’un
livre fait rire, Dieu est tout près ; c’est donc, de la part de notre
champion réaliste, un avant-goût d’infini (« les femmes exagérément plantureuses n’intéressaient plus que quelques Africains et quelques pervers », p. 73 ; « un banc de brume flottait sur les eaux, réfractant les rayons du soleil couchant », p. 114). Disons-le tout net : La Carte et le Territoire est un page turner redoutablement efficace (« Il ouvrit largement les bras pour l’accueillir ; c’est peu de dire qu’il rayonnait »,
p.90), et si Houellebecq est le seul auteur à avoir su révéler notre
monde avec autant d’acuité et de sensibilité, c’est parce que son
dernier roman est un roman total, tour à tour bilan de l’état du monde
et autoportrait. Ceux qui liront ce labyrinthe métaphysique sidérant de
maîtrise, signé par le meilleur écrivain de son temps, y retrouveront la
quintessence de la musique houellebecquienne (« Jed trébucha dans une poussette » ; « il faisait halte pour s’orienter dans une brasserie », p.114). Certes, La Carte et le Territoire est un roman à la structure complexe et vertigineuse, mais c’est aussi un roman puissant, plein de brillantes intuitions (« la fortune ne rend heureux que ceux qui ont toujours connu une certaine aisance », p. 396), palpitant et profond (« les années, comme on dit, passèrent »,
p. 410), qu’on peut dores et déjà qualifier de pièce la plus aboutie
d’une œuvre déjà considérable. A tous égards, un conte acide qui
bouscule les idées reçues et dans lequel on entend, à chaque page, une
musique rarissime (« il fut soudain saisi d’un trouble sentiment de familiarité », p. 114 ; « la surface gigantesque et ridée de la mer »,
p. 133). Il convient de le rappeler : Houellebecq ose ce que personne
ne fait et fait ce que personne n’ose, il nous offre un monument de mots
avec ce très grand roman comme il en arrive rarement, comme il vient de
nous arriver, nous laissant seul avec ce chef d’œuvre (« c’était aussi beau qu’un Cézanne, ou que n’importe quoi », p. 38) dont on n’a pas fini d’explorer tous les recoins («’Je vous ennuie ?’ s’interrompit-elle soudain », p.69).
[Le
texte que vous venez de lire est exclusivement constitué de citations
de presse et d'extraits du livre de Michel Houellebecq, La Carte et le Territoire]
…Bienvenue dans la réalité…
Bonjour Claro, puisque la rotation de la Terre sur elle-même se trouve passablement ralentie en raison de la fonte chapeautée par la loi de gravité qui entraîne les eaux ainsi obtenues vers l'équateur (devra-t-on attendre à long terme une planète délestée d'un giga- poids aux pôles en forme de citron parfaitement symétrique avec toutes ses conséquences poétiques...) , enfin, puisque nous tournons tous sur nous-même en accord synchrone avec ce mouvement et que dans un souci constant d'harmonie additionné d'une quête d'Universalité suggéreriez vous qu'il nous faille relire fabuleusement éclairés par l'énergie nouvelle qui vient à nous propulser vers un avenir meilleur ce roman cuvée rentrée 2010 sans que cela puisse effacer l'effet des activités érosives, corrosives, néfastes, de particules follement irrégulières ?
RépondreSupprimeril n'y a pas à dire
RépondreSupprimerla littérature, quand elle est belle, elle est belle
(et réciproquement)
ceci dit
1- la réciprocité s'adresse t'elle à la littérature ou à sa beauté ?
2- Houellebecq, cela me fait penser à Zorbec (le Gras) dans Pierre Dac
comme quoi, il existe des associations d'idées parfois intéressantes
Merci Claro, j'ai justement évité une "dispute" à son propos il y a quelques jours, pour ne pas être désagréable aux gens qui me demandaient: "Pourquoi "Houellebeurk"?".
RépondreSupprimerJe crois que je vais leur poster le lien vers cette page...