L'art d'économiser ses lectures
Il n’est point dans le seul domaine culinaire que l’intelligente application d’une recette, l’à-propos de son exécution, simplifient cette économie ménagère dont l’utilité ne saurait se contester. De génération en génération, les traditions de nos aïeul(e)s se sont perdues, certains ersatz de la dernière guerre sont hélas passés de mode, de même les habitudes ancestrales d’accommodement des restes que l’abondance actuelle des produits manufacturés semble avoir aboli de la mémoire française.
D’où ces utiles conseils aux lecteurs épisodiques, les plus nombreux puisqu’il apparaît que pour les deux tiers de nos concitoyens des deux sexes l’acquisition annuelle d’un seul ouvrage imprimé suffit amplement à leur usage familial. Raison de plus pour traiter au mieux cet opus unique, et donc d’une précieuse rareté, cet ami domestique qui a besoin comme chien ou chat de ménagements, d’attentions et de soins, bref d’un entretien régulier qui facilitera d’autant le legs des arts et lettres à nos descendants. Parmi tous les préparatifs de lecture ayant fait leur preuve depuis l’invention de Gutenberg, nous souhaitions vous donner ici trois astuces pratiques à l’usage d’un public soucieux d’équilibrer son budget entre denrées de première nécessité et accessoires d’ameublement spirituel.
1. Cassez un oeuf et séparez le jaune que vous diluerez dans deux décilitres d’alcool à 90° avec une cuillère en bois. Imbibez-en un chiffon blanc et passez-le sur le dos et la couverture de votre livre, s’il est relié cuir. Dans le cas contraire, n’en faites rien, ajoutez plutôt une cuillerée de vinaigre à cette mixture et versez-la en entier sur vos cheveux préalablement mouillés, laissez agir ce shampooing naturel une demi-heure au moins, pendant laquelle vous pourrez vaquer à vos occupations habituelles, avant de rincer abondamment.
2. Munissez-vous d’une râpe à fromage et réduisez menu les restes de savon que vous aurez de longue date mis à sécher sur un radiateur. Feuilletez votre livre jusqu’aux pages comportant des taches de doigts, frottez avec la poudre nettoyante, puis épongez en surface et glissez des papiers buvard entre les feuilles ainsi humidifiées. A peine un coup de fer à repasser, et vous pourrez replacer l’ouvrage à l’état neuf en son rayonnage. Si votre opus n’en avait nullement besoin, versez le résidu savonneux dans un demi-verre d’huile d’olive, jusqu’à produire une pâte que vous amalgamerez à de l’encre de seiche, et laissez pénétrer ce cirage de marine dans le cuir une nuit entière avant de lustrer vos chaussures de ville avec une vieille chaussette de coton.
3. Si certaines pièces de votre logis infectent le tabac, votre livre risque de jaunir, sur la tranche principalement. Il vous suffit alors d’enduire cette tranche d’une solution obtenue en mélangeant deux blancs battus avec quelques gouttes d’eau de vie. En ayant fait mousser le tout et laissé reposer une bonne minute, vous appliquerez enfin une feuille d’or sur le fil des pages mises sous presse ou quelque lourde tare. Mais si, au prix exorbitant du métal fin, la méthode vous semble par trop dispendieuse, prêtez votre volume aussi longtemps que nécessaire à un fumeur définitivement repenti.
De même, si la couleur de vos dents laisse à désirer, et qu’il n’entre pas dans votre budget de pouvoir les redorer de la sorte, vous combattrez le mal par le mal, en effaçant leur teinte nicotinique par l’usage du dentifrice qu’ont bien connu nos soldats dans les tranchées : cette cendre froide de cigarette qui récure, même à sec, sans jamais rayer l’émail.
Il n’est point dans le seul domaine culinaire que l’intelligente application d’une recette, l’à-propos de son exécution, simplifient cette économie ménagère dont l’utilité ne saurait se contester. De génération en génération, les traditions de nos aïeul(e)s se sont perdues, certains ersatz de la dernière guerre sont hélas passés de mode, de même les habitudes ancestrales d’accommodement des restes que l’abondance actuelle des produits manufacturés semble avoir aboli de la mémoire française.
D’où ces utiles conseils aux lecteurs épisodiques, les plus nombreux puisqu’il apparaît que pour les deux tiers de nos concitoyens des deux sexes l’acquisition annuelle d’un seul ouvrage imprimé suffit amplement à leur usage familial. Raison de plus pour traiter au mieux cet opus unique, et donc d’une précieuse rareté, cet ami domestique qui a besoin comme chien ou chat de ménagements, d’attentions et de soins, bref d’un entretien régulier qui facilitera d’autant le legs des arts et lettres à nos descendants. Parmi tous les préparatifs de lecture ayant fait leur preuve depuis l’invention de Gutenberg, nous souhaitions vous donner ici trois astuces pratiques à l’usage d’un public soucieux d’équilibrer son budget entre denrées de première nécessité et accessoires d’ameublement spirituel.
1. Cassez un oeuf et séparez le jaune que vous diluerez dans deux décilitres d’alcool à 90° avec une cuillère en bois. Imbibez-en un chiffon blanc et passez-le sur le dos et la couverture de votre livre, s’il est relié cuir. Dans le cas contraire, n’en faites rien, ajoutez plutôt une cuillerée de vinaigre à cette mixture et versez-la en entier sur vos cheveux préalablement mouillés, laissez agir ce shampooing naturel une demi-heure au moins, pendant laquelle vous pourrez vaquer à vos occupations habituelles, avant de rincer abondamment.
2. Munissez-vous d’une râpe à fromage et réduisez menu les restes de savon que vous aurez de longue date mis à sécher sur un radiateur. Feuilletez votre livre jusqu’aux pages comportant des taches de doigts, frottez avec la poudre nettoyante, puis épongez en surface et glissez des papiers buvard entre les feuilles ainsi humidifiées. A peine un coup de fer à repasser, et vous pourrez replacer l’ouvrage à l’état neuf en son rayonnage. Si votre opus n’en avait nullement besoin, versez le résidu savonneux dans un demi-verre d’huile d’olive, jusqu’à produire une pâte que vous amalgamerez à de l’encre de seiche, et laissez pénétrer ce cirage de marine dans le cuir une nuit entière avant de lustrer vos chaussures de ville avec une vieille chaussette de coton.
3. Si certaines pièces de votre logis infectent le tabac, votre livre risque de jaunir, sur la tranche principalement. Il vous suffit alors d’enduire cette tranche d’une solution obtenue en mélangeant deux blancs battus avec quelques gouttes d’eau de vie. En ayant fait mousser le tout et laissé reposer une bonne minute, vous appliquerez enfin une feuille d’or sur le fil des pages mises sous presse ou quelque lourde tare. Mais si, au prix exorbitant du métal fin, la méthode vous semble par trop dispendieuse, prêtez votre volume aussi longtemps que nécessaire à un fumeur définitivement repenti.
De même, si la couleur de vos dents laisse à désirer, et qu’il n’entre pas dans votre budget de pouvoir les redorer de la sorte, vous combattrez le mal par le mal, en effaçant leur teinte nicotinique par l’usage du dentifrice qu’ont bien connu nos soldats dans les tranchées : cette cendre froide de cigarette qui récure, même à sec, sans jamais rayer l’émail.
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