Mon éditeur Verticales fait bien les choses - voici ce qu'il dit de mon prochain roman à paraître sur son site (et je serais tenté de le croire…). Date de sortie: 7 février 2008.
Dans son livre précédent, Black Box Beatles, Claro pénétrait la conscience artificielle d’un robot tombant par hasard sur une boîte noire, dernier vestige de la civilisation humaine, contenant l’intégrale des Beatles. Ce subterfuge narratif lui permettait de s’approprier de façon détournée et jubilatoire un pan entier de la pop-culture.
La folie douce de Madman Bovary part d’un procédé similaire, mais c’est le chef d’œuvre de Gustave Flaubert qui fait ici l’objet d’un « plagiat psychique » (en l’occurrence explicite et assumé). Tout part d’une banale rupture amoureuse. Le personnage-narrateur tente de conjurer sa rupture avec une certaine Estée et cherche un dérivatif à son absence. Encore sous le choc, il se jette dans la lecture compulsive de Madame Bovary. Ce livre, il l’a déjà lu et relu, à tel point qu’il s’y sent presque chez lui. À peine entré dans la salle de classe du premier chapitre, il s’y promène, il s’y démène, avant de s’y dissoudre et bouleverser ainsi la structure du roman, devenant le double tyrannique et schizophrène de l’auteur. Mais « jouer au démiurge à ceci de navrant que les dés qu’on pipe sont toujours ceux de l’autre », et l’œuvre de Flaubert, mâchée et remâchée, ne se laisse pas facilement digérer.
Dès lors, il faut à ce psychopathe littéraire, qui ne parle jamais d’un même « je », inventer à Emma Bovary des mœurs trash et au très guindé Charles des orgies de cocaïne. Il lui faut aussi revisiter d’une façon burlesque, pathétique ou déjantée toutes les scènes-clés du roman (du banquet de mariage au suicide d’Emma à l’arsenic). Pour ce faire, l’anagramatique « madman » doit sans cesser changer de nature, endossant diverses identités parasites : puce, virus, voyeur, charognard, âme damnée d’une casquette, rat de bibliothèque, pique-assiette, gâte-sauce ou passager clandestin du navire flaubertien en déroute.
Cette fièvre des métamorphoses devient le véritable moteur d’un récit à double-fond. Dans cet univers sous influence, l’amoureux en état de manque voit partout l’ombre obsédante de sa chère Estée, comme pour mieux la vider de son sens ou se déposséder d’elle, sur le fil du rasoir de la saturation et de l’oubli. Éternel décalé, provincial à lui-même, il cherche désespérément en les autres (personnages, détails anatomiques et objets du décor) son propre centre de gravité. Entre cauchemar et catharsis, sa mise à mal du texte le conduira aux limites de la négation de soi, dans la peau d’un SDF tabassé par des policiers ou d’un cinéaste filmant l’agonie suicidaire d’Emma.
Claro s’offre ici un nouveau grand écart narratif où la familière étrangeté d’un chef d’œuvre devenu terrain de jeu existentiel donne naissance à une polyphonie délirante. Moquant la déférence mortifère envers l’académisme littéraire, il rend hommage à l’inventeur du roman moderne sur le mode d’un sabordage érudit. Mais il renoue aussi avec l’ambivalence ironique de son maître pour les passions du cœur en signant là son roman le plus cruellement sentimental.
Avec Madman Bovary, la langue de Claro, maintenue sous tension par la folie démiurgesque du projet, n’a jamais autant joui de sa propre liberté, entre cut-up musical et subversion des registres.
Et allez, je viens de baver sur mon clavier...
RépondreSupprimer(s):simplet (alias 1/7)
Moi, j'ai connu "Madman Bovary" en mangeant à mon resto chinois habituel et mon voisin "chauve" a posé ce livre : bien en évidence sur sa table ...
RépondreSupprimerj'avoue que j'aimerai bien "découvrir" ce livre ... et pourquoi pas le lire à haute voix pour mon association d'aveugles ???
A +
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