mercredi 27 juin 2007
Les entrailles de la grace
Traduisant le poème inédit de Vollmann, "Etoile de Paris", mes doigts censés être agiles tapent les mots croire, veine, satisfaction, et ainsi de suite. Ne jamais oublier, outre les mots, de se rappeler le sens qu'ont pris ces mots dan sla chair au fil des vies accumulées et dans la chair inscrite. Ne jamais écrire "satisfait" plutôt que "content", ou "rassasié ou je ne sais quoi, si l'on a pas souffert/joui de ces affects. Donc, non pas juste sentir qu'ils – tels des dés – roulent jusqu'à leur sort chiffré en bout de piste, en harmonie avec le vert feutré et la courbure de l'horizon défini par les règles du jeu verbal, mais se rappeler, comme dans un exercice d'évacuation d'urgence mentale, que ces mots ont poids, brûlure, faille, etc, dans ce mille-feuille gourd que devient notre expérience. Une forme de sincérité inédite: le baiser mouillé qu'on a eu avec ces sens avant qu'ils deviennent, papier oblige, mots. Parfois, c'est possible, mais pas toujours. Ce qui est sûr, c'est que traduire, dans ces cas-là, revient à passer – et, je le rappelle, à passer "vite" – par ces trous qu'on croyait pleins. Les doigts, alors, ne sont pas seulement, ne doivent pas seulement être agiles, ils doivent "conduire" la foule des perceps qui les a fait doigts (et donc agents de l'agir, du plaisir, et de pas mal d''autres choses). Dira-t-on assez, dira-t-on une seule fois qu'écrire (ou traduire) est une activité physique, pleine d'yeux et de culs, de cassages de gueule et de bras de fer, de bronze, de platine? Que le corps à corps secoue l'assis. Sinon, franchement, autant "rédiger". D'où le style "dictée" de tant de romans, depuis l'Astrée jusqu'à vous savez qui. Bien sûr, je schématise, mais comme on plie une tôle: pour que ça s'entende.
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Je ne suis pas certain que tu schématises tant que ça...
RépondreSupprimerJe ne sais pas si tu as lu Waltenberg de Heddi Kaddour, paru voilà deux ans, mais il vaut le détour et est très loin devant la production éditoriale française actuelle..
Sinon en ce moment, (re)découverte de Roger Nimier, je sens que je vais passer un moment avec lui, pour l'année qui suit.