mardi 22 décembre 2009
Brian Evenson in Paris
jeudi 17 décembre 2009
Pas joli joli
"Beaucoup de romanciers surtout en France, font du joli pour le joli. Ils enfilent les phrases tarabiscotées avec des mots de vocabulaire qu'il faut chercher dans le dictionnaire comme on enfile des perles pour faire un collier. Cela fait juste un tas de jolis phrases. Pas un livre. Ils feraient mieux d'être poètes. Au moins c'est plus clair. Toute scène doit avoir une raison d'être autre que décorative. Le public n'a pas (n'a plus?) la patience de lire des descriptions de paysages de plusieurs pages ou il ne se passe rien, ni des dialogues sans informations qui n'en finissent pas. La forme ne peut pas être une finalité, la forme soutien le fond. Il faut d'abord avoir une bonne histoire ensuite à l'intérieur on peut aménager des zones décoratives, mais sans abuser de la patience du lecteur."
Voilà. Tout est dit. Ça se passe presque de commentaire. Pour écrire de bons livres, il faut anticiper la demande du lecteur, lecteur qui a bien changé et qu'on ne va pas emmerder avec de pénibles descriptions de pension Vauquer, soyons sérieux un instant. C'est au final assez neuh-neuh, plutôt inoffensif, globalement pathétique, et très… werberien. Et oui: nous ferions mieux d'être poètes. Quant à monsieur Bernard, qu'il évite effectivement les jolies phrases. Elles n'y gagneraient rien.
mercredi 16 décembre 2009
Choir, choir encore, choir mieux
"Une seule ambition pour les habitants de Choir,
notre seul projet, quitter Choir. C’est formulé ici avec
mesure, froidement, pour la chronique. En temps normal,
nous le hurlons.
BONDIR HORS DE CHOIR !
oh ! moi !
laisser Choir sous moi, déchet immonde de ma
décrépitude, de mon incontinence !
HORS DE CHOIR BONDIR ! ISSIR !
m’arracher à ses glus, à ses boues, élargir les huit
trous de mon corps afin que s’écoule au travers tout
le sable de Choir !
puis dans mon dos retombe !"
mardi 15 décembre 2009
Lisez Chauvin
Serge Chauvin, qui travaille pour Gallimard depuis maintenant un bail, et qui compte à son actif une belle pléiade d'auteurs (Paul West, Jonathan Coe, Zadie Smith, Stephen Wright, etc), est un traducteur particulièrement attaché au grain des phrases, à la rythmique, discret et lunaire, "remuant les lèvres comme s'il voulait se rendre compte du goût des mots" (j'emprunte l'image à Faukner…), doté d'un solide sens de l'humour (Chauvin a évoqué les "nouilleries" dont ne peut se passer tout traducteur), sans lequel traduire n'a guère d'intérêt, tant la symbiose passe, ainsi qu'il l'a rappelé, par la "volupté" – et qui dit volupté, dit rire, enfin je crois, j'espère.
lundi 14 décembre 2009
Détectives sauvages et critiques domestiques
The market has its landlords, like everything on this infected planet, and it’s the landlords of the market who decide the mambo that you dance, whether it’s selling cheap condoms or Latin American novels in the U.S.Au passage, Moya cite un email que lui avait envoyé Bolaño, dans lequel ce dernier éreinte l'establishment littéraire latino-américain:
"the rancid private club full of cobwebs presided over by Vargas Llosa, García Márquez, Fuentes, and other pterodactyls.”Balzac a dit que la gloire est le soleil des morts. Evitons-leur néanmoins les brûlures.
samedi 12 décembre 2009
Vollmann Yes, Vollmann Nô
Commence alors une drôle de guerre. Je traduis des extraits, les envoie à divers éditeurs, prends des contacts – en vain. Un jour, par l'agent de Vollmann, Susan Golomb, j'apprends que Balland a acquis les droits de ces deux premiers titres. Je commence alors la traduction de You Bright pour Balland, mais trois mois plus tard Balland est contraint de mettre la clé sous la porte. D'autres projets m'accaparent, même si de temps en temps je tente de "fourguer la came Vollmann". Personne ne veut entendre parler de l'ami Bill, qui entre-temps écrit, écrit, écrit… Enfin, un jour, Brice Matthieussent m'appelle, suite au dossier que je lui ai envoyé sur Vollmann. Du temps a passé, du temps passe encore, et il faut attendre 1999 pour que paraissent chez Bourgois Des putes pour Gloria et Treize Récits & Treize Epitaphes. L'année d'après sera publié Les récits arc en ciel. Puis Bourgois connaît des difficulté financières et jette l'éponge en voyant arriver sur son bureau la pachydermique Famille Royale. Tout est à recommencer. Il faudra s'armer de patience, une fois de plus. C'est alors que je fais la connaissance, lors d'un débat sur la traduction avec l'incroyable André Marcowicz, de Marie-Catherine Vacher, éditrice chez Actes Sud. Elle me reçoit la semaine qui suit dans son bureau de la rue Séguier, m'écoute lui présenter plusieurs projets de traduction qui me tiennent à cœur (Vollmann, bien sûr, mais aussi Mulligan Stew et Le Tunnel, entre autres curiosités…) et me rappelle dix jours plus tard pour me dire que, oui, La Famille Royale, c'est un grand livre, on va le faire, on va enfin imposer Vollmann.
A dater de ce jour, l'ami Bill a trouvé sa place parmi ses contemporains traduits, il a remporté le prestigieux National Book Award (mais un seul prix littéraire en France à ce jour, pour Poor People) et d'autres éditeurs prêtent main-forte pour diffuser son œuvre (Tristram, Lot49), d'autres traducteurs s'y attellent vaillamment (Jean-Paul Mourlon, Bernard Hoepffner…).
(Je garde des souvenirs incroyables de chacune de mes rencontres avec Vollmann. La première fois, je lui avais offert un exemplaire des Chants de Maldoror, publié par Guy Levis Mano, et lui, en échange m'avait demandé si je voulais bien lire ses prochains textes. Et comment! Je revois encore Vollmann me tendre une enveloppe contenant… dix-sept disquettes. L'intégral de The Royal Family and de Rising Up and Rising Down! Deux imprimantes ont fini par y passer mais j'ai longtemps gardé ces incroyables manuscrits près de mon bureau. Autre souvenir: les mêmes flics nous arrêtant une deuxième fois près de Barbès alors que Vollmann essaie de convaincre un travelo de se laisser dessiner… Vollmann et moi aux objets trouvés dans l'espoir de remettre la main sur un cahier de dessins qu'il a perdu dans le métro après avoir fait un malaise… Vollmann en tee-shirt jaune canari lisant au Village Voice, à son retour de Sarajevo, ses bagages ayant été perdus par la compagnie de vol… La liste serait longue.)
Le 4 février, donc, on pourra découvrir chez Actes Sud un nouveau texte de Vollmann, Etoile de Paris, encore inédit aux Etats-Unis. En attendant la parution, donc donc donc, de son vingt et unième livre aux USA, le 6 avril 2010, chez l'éditeur Ecco (celui qui a déjà publié la version "light" de son livre sur la violence). Un essai de 528 pages intitulé Kissing the Mask: Beauty, Understatement and Femininity in Japanese Noh Theater, with Some Thoughts on Muses (Especially Helga Testorf), Transgender Women, Kabuki Goddesses, Porn Queens, Poets, Hou.
Avec Vollmann, on a toujours l'impression que l'aventure ne fait que commencer. Actes Sud a acquis les droits de Riding Toward Everywhere, son récit sur les hobos. Lot49 a encore quelques volumes des Seven Dreams dans sa ligne de mire. Il est question de publier un jour son premier roman, You Bright and Risen Angels. Une coédition Inculte/Lot49 pour un Face à Vollmann, comme nous avions fait Face à Pynchon, est en gestation.
William T. Vollmann n'en est apparemment qu'aux balbutiements de son œuvre – cinq livres l'occupent parallèlement en ce moment…
vendredi 11 décembre 2009
Translate this book
La question sera toujours excitante: qui nous manque? quel livre manque à notre déluge de publications? Mais oui, il y aura toujours des livres qui manquent, des livres-haches pour briser la mer gelée, des livres qui nous aideront à oublier tous ceux qui ne nous manquent pas, loin de là, tous ceux qui manquent à eux-mêmes, qui montrent le nez parce qu'ils n'ont même pas de visage, et qu'on n'a même pas envie de moucher.
jeudi 10 décembre 2009
Match Box: BS Johnson pro defunctis
Alors ouvrons B.S. Johnson, ouvrons-le n'importe où, et nous aurons l'impression d'intense découverte qu'on a pu avoir en lisant pour la première fois, par exemple, Arno Schmidt. Ouvrons Chalut, paru en 1966 (traduit chez Quidam en 2007), croisière maudite dans des eaux qui sont peut-être celles de l'âme déchirée, et où la seconde guerre mondiale ne cesse de remonter à la surface, comme un leviathan têtu, venu cabosser l'onde de la narration. Ouvrons et lisons:
". J'éprouve sans doute, j'ai sans doute éprouvé, une certaine sympathie envers les poissons, comme envers toute forme de vie sur le point de subir ce qui semble être, en tout cas pour n'importe quel être humain, une mort douloureuse, venant mettre un terme à une souffrance qui n'est pas aussi brève qu'on le pense: mais une fois vidés, lavés, dégringolant et glissant, ils deviennent absurdes, ces poissons, n'éveillent plus la moindre pitié, ils ont même l'air plutôt ridicules sans leurs viscères, avec leurs flancs béants qui pendent désormais, flasques et inutiles, déjà nourriture et non plus poissons."Voilà pour la prose de celui que certains qualifient de formaliste. Ouvrons ses autres livres traduits, ouvrons R.A.S Infirmière-Chef (une comédie gériatrique), ou Christie Malry règle ses comptes, ou Albert Angelo. Chaque fois, l'événement est traité dans la minutie de son explosion invisible, et la phrase s'invente des devenirs, des disparitions, des mutations. "La forme suit la fonction", ainsi qu'il l'écrit dans des notes pour l'écriture d'Albert Angelo.
On prêtera donc une attention accrue (ou nouvelle, selon) à la parution chez Quidam, il y a un peu moins d'un mois, de son roman Les Malchanceux, traduit magnifiquement une fois de plus par Françoise Marel, et qui est une traversée des ombres, une destruction théâtrale de la routine et de cet éternel et insupportable retour du même, rendu encore plus insupportable quand il est ponctué par la mort.
On pourrait dire qu'il s'agit des errances d'un chroniqueur sportif censé rendre compte d'un match de football – "Faut que j'aille au stade, incroyable comme mon esprit se laisse emporter." – , mais dont chaque pas foule une tombe fraîche comme le souvenir, celle et celui d'un ami emporté par le cancer, Tony:
"[June] m'avait appelé pour me dire que Tony était au plus bas, il avait besoin de sortir de lui, comme elle disait, je sais plus, je crois que c'est ce qu'elle a dit, une expression banale qui prend tout à coup un caractère philosophique"
On pourrait dire aussi que Les Malchanceux sont une boîte de Pandore, et que Pandore est le nom du déni craquelé. Le livre se présente en effet sous forme de cahiers agrafés, non paginés, enfermés dans un boîtier qui, une fois ouvert, nous offre, non sans ironie, son mode d'emploi:
Ce roman possède vingt-sept sections temporairement tenues ensemble par un bandeau amovible. Exception faite du premier et dernier "chapitres" (indiqués comme tels), les vingt-cinq autres peuvent être lus dans n'importe quel ordre. Si le lecteur préfère ne pas accepter l'ordre dans lequel il a reçu le roman, qu'il se sente libre de le réarranger, avant lecture, dans l'ordre que lui offrirait le hasard.
Mais le lecteur aura beau brasser les cartes des pages, il n'échappera pas, comme dans Finnegan's Wake, à l'inexorable morsure de la spirale, et il lui faudra passer de toutes façons par ces moments de tension, ces basculements, ces souffles cassées qui disent la vie de Tony, celle du narrateur, et peut-être aussi celle du lecteur. B.S. Johnson fait de son personnage un Ulysse vaincu et cependant témoin, témoin du réel en prise avec les ruines du temps, témoin de la douleur nichée dans le rire, passager de la ville toujours à réinventer dans sa géographie cannibale – "rien à voir avec un pèlerinage", est-il précisé à un moment.
Réalisé avec un soin admirable par l'éditeur Quidam, Les Malchanceux, "livre disloqué", roman de la perte mais aussi des retrouvailles, devrait, avec la parution prochaine, en janvier 2010, de la biographie consacrée à B.S. Johnson par Jonathan Coe (traduit par Vanessa Guignery), permettre d'embrasser encore plus pleinement cette œuvre insolente, désespérée, métamorphique, écrite par un homme qui, le 13 novembre 1973, sut mettre un point final à sa vie tout en colères et fulgurances.
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Note: De Vanessa Guignery, la traductrice de sa biographie à paraître, on lira également avec profit: Ceci n'est pas une fiction. Les romans vrais de B. S. Johnson, Paris : Presses de l'Université Paris-Sorbonne, coll. "Britannia", 2009, 320 p.
Les Malchanceux
de B.S. Johnson
Préface de Jonathan Coe
Traduit de l'anglais par Françoise Marel
32 euros
ISBN : 978-2-915018-39-4
lundi 7 décembre 2009
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Prise de son et mixage : Pierre Minne
Montage : Axel Brisard et Chloé Gambert
Assistante : Marie Dupuis
jeudi 19 novembre 2009
Sachez chasser : lisez Zaroff
La chose est entendue : l’homme est une proie pour l’homme. A fortiori, donc, pour l’écrivain. Il ne suffit pas de se choisir des cibles, encore faut-il les identifier, les identifier et les éliminer, en s’esquivant à temps, tête haute, corps voûté, sans courir, à fond de train. Le Zaroff de Julien d’Abrigeon – publié par Laure Limongi, label LaureLi, en librairie le 25 novembre, extrait ici – exécute des contrats, il exécute, c’est un exécuteur, mais il n’est pas certain que ses victimes soient forcément celles qu’on croit. Le récit de ses battues, qu’on devinera assez vite «en brèche», se répartit en chasses, sorties, reflets, traques et cavales, à lire dans l’ordre qu’on voudra, car de toutes façons personne ne sortira d’ici vivant. Une chasse, qu’est-ce que c’est ? Eh bien, outre une partie de plaisir, c’est un peu comme un chapitre : des règles s’inventent, qu’on enfreint, un style se présente, qu’on fauche, des constantes s’installent, qui brûlent. Zaroff n’est pas là pour nous donner le goût du sang ou des envies de pitié. Zaroff est là pour piéger la langue, sa langue, et toutes celles qui s’amusent à pendre. S’il sent que la syntaxe le suit, il la piège. S’il faut donner des directions, il les donne, se perde qui veut. D’Abrigeon est aux platines, il fait grincer les ritournelles, se saborde en souriant, fait du paradoxe un boomerang. A chaque phrase, il repart de zéro, permute, invite, détourne. Dès qu’on le suppose bricoleur, il se révèle armateur. Tel un pied piétinant son empreinte avec son ombre, il repasse par les tropes qu’il tord. Et s’ingénie à faire bégayer le lecteur qui s’imaginait convié à d’affreux tours de manège dans la conscience.
Zaroff est un chasseur d’un genre particulier, qui apprend au lecteur à chasser le sens, à coups d’immédiates impostures, d’escamotages peu réglos, de fuite en avant en arrière à droite à gauche. Il dit « je », mais comme s’il mordait le « je » du lecteur, à la façon poético-délictueuse d’un Cadiot, sachant très bien où il va, c’est-à-dire au milieu, milieu de la langue parce que plis à passer par, milieu du récit parce que la trace parle, elle aussi.
Sa dictée est enrayement. Le fluide l’attire, mais pour mieux déliter. Quel énergumène, ce Zaroff. Refusant d’être personnage, trahissant le narrateur en lui, toujours à l’affût, planqué fuyard prédateur. Et plus on le suit dans ses méandres, plus on efface ses repères.
Comment fonctionne un livre qui veut s’en sortir, veut sortir du livre, du lecteur ? Julien d’Abrigeon le sait, le dit, le fait. Et en plus l’écrit, la preuve :
« Le piège amuse s’il est un peu ludique. Les trous, pics et branchages fonctionnent, efficaces, mais ils lassent. Je me plonge dans la lecture d’anciens manuels de chasse, les pièges y sont pléthore. Un peu d’astuce, d’espièglerie, et la mécanique est adaptée à l’homme.
« Le mécanisme est conçu. Il fonctionne. Un mouvement en entraîne un autre. Le levier, levé, déclenche le mouvement de la clenche. Il s’enclenche au préalable. Le ressort se compresse. Sa force est comprimée. Elle attend le stimulus mécanique. Une lamelle se déplace. La ficelle sur la poulie se meut. L’engrenage est simple. Les forces se démultiplient. La mise en branle est dès lors inévitable. Coulisse, glisse. Une fois la chevillette tirée, la bobinette choit. La bobinette chue, tout s’enchaîne alors avec moins de minutie et la sauvagerie s’applique, sans détour. »
L’art poétique tue, il tue toujours, il se tait aussi, de temps en temps, pour aller ailleurs, essayer d’autres milieux, coller à d’autres climats. Il cloue le lecteur, l’aide à s’arracher, on ne saurait s’en passer, on repasse, ça a changé, encore et encore.
D’Abrigeon n’a pas créé Zaroff, certes. Zaroff existait déjà, d’abord dans un film en noir et blanc, puis dans les consciences, à l’état séminal, comme le nom Zaroff, le mot Zaroff, un zaroff oublié chassé par un zaroff recommencé, jusqu’à ce que, bing ! d’Abrigeon reprenne Zaroff, sa force, sa volonté, et lui inocule l’insidieux humour du chasseur sachant chasser, de l’écrivain écrivant qu’il écrit. C’est un jeu de massacre, on se le dit, on le lit.
Et comme si ça ne suffisait pas, Vincent Sardon a créé une des plus chouettes couvertures de livre de l’année. Finalement, ce mois de novembre aura servi à quelque chose.
mardi 10 novembre 2009
On en hait là
Monsieur Raoult fait de temps en temps parler de lui, en parlant d'autrui, tel un fier arroseur arrosé, quand il n'est pas occupé à réclamer le rétablissement de la peine de mort pour les terroristes ou à astiquer sa carte de membre du comité d'honneur du Mouvement Initiative et Liberté, une cellule de réflexion (?) n'ayant rien à voir avec l'ancien SAC puisqu'elle est composée de penseurs comme Charles Pasqua, Jean Tibéri, Robert Pandraud, etc.
Il y a quelques jours, ce fier Raincéen s'est fendu d'un courrier au ministre de la Culture pour le moins stupéfiant. Il demande à Frédéric Mitterand "ce qu'il compte entreprendre en la matière". La matière? La matière, en l'occurrence, ce sont les propos tenus par l'écrivaine Marie NDiaye, lauréate du prix Goncourt 2009 pour Trois femmes puissantes. Cette dernière a critiqué la France de Sarkozy dans un entretien donné au magazine Les Inrockuptibles.
Choqué, outré, gonflé à bloc, Monsieur Raoult a donc pris la plume – on ignore de quel fondement il se l'est sortie… – pour secouer la vigilance d'un ministre. Ses propos, outre leur grotesque, méritent réflexion, car ils comportent quelques perles qu'on n'oserait même pas jeter en pâture à des géniteurs de nourrains.
Ainsi, Eric Raoult écrit:
"Une personnalité qui défend les couleurs littéraires de la France se doit de faire preuve d'un certain respect à l'égard de nos institutions (…)."Eh bien non, Monsieur Raoult, Marie NDiaye ne "défend pas les couleurs littéraires de la France", enfin je ne crois pas, et ce pour plusieurs raisons:
1/ Le prix Goncourt n'est pas une compétition sportive internationale (rappelons que l'expression "défendre les couleurs" a d'abord été lié aux courses de chevaux (couleurs des casaques qui désignent les propriétaires) avant de désigner les habitudes nationales (drapeau).
2/ Marie NDiaye ne s'est pas inscrite à cette épreuve sportive qui n'en est pas une, ce sont des jurés qui ont sélectionné son livre.
3/ Marie NDiaye ne défend rien, elle écrit.
Par ailleurs, le maire du Raincy évoque un certain "droit de réserve", qu'il semble estimer judicieusement antipodique à cet agaçant "droit d'expression". Selon Monsieur Raoult, promoteur du couvre-feu avant même l'état d'urgence, un écrivain a le droit de s'exprimer publiquement sur la politique de son pays, mais uniquement pour "respecter la cohésion nationale et le symbole qu'elle représente" – on aurait pu croire que c'était là le propre d'un député…
On ignore ce que Monsieur Raoult, qui est par ailleurs fan, sur Facebook, du "plan de relance du Nutella", pense de l'attribution du Nobel de littérature en 1964 à Jean-Paul Sartre.… En revanche, on ne peut que s'interroger sur la dernière partie de sa missive à Frédéric Mitterrand, quand il déclare sans broncher:
"C'est pourquoi, il me paraît utile de rappeler à ces lauréats le nécessaire devoir de réserve, qui va dans le sens d'une plus grande exemplarité et responsabilité."Rappelez-vous, il était question de Marie NDiaye, par ailleurs lauréate 2009 de la bourse Jean-Gattégno du Centre national du Livre (établissement public du Ministère de la Culture). Et voilà que soudain, sans prévenir, Monsieur Raoult, Ministre chargé de l'intégration et de la lutte contre l'exclusion du 18/05/1995 au 07/11/1995, passe à un étrange pluriel, à un douteux démonstratif: "ces lauréats". Faut-il entendre les lauréats passé? ceux à venir? Y a-t-il amnistie pour des propos critiques tenus avant novembre 2009? On l'ignore. On peut en revanche supposer que ladite mise en garde s'applique à tous les lauréats de tout prix littéraire, quel qu'il soit. A Atiq Rahimi aussi bien qu'à Jean Cau?
On devrait toujours se méfier de l'expression "ça commence comme ça". Mais parfois elle affleure à la conscience dès lors qu'on est confronté à de tels propos, propos qui sont surtout une démarche, puisque Eric Raoult, célèbre auteur de la désormais célèbre saillie "Le Raincy c'est pas Bamako", attend de pied ferme que le ministre de la Culture "lui indique[r] sa position sur ce dossier, et ce qu'il compte entreprendre en la matière".
Eh bien nous aussi nous attendons que Frédéric Mitterrand réponde à ce vaillant député. Qu'il entreprenne en la matière. Qu'il nous décline, sans ambiguïté, ces énigmatiques couleurs de la France littéraire" en manque de défenseurs.
A défaut de réponse, il nous faudra procéder à certaines déductions, tirer certaines conclusions, user de notre droit de réserve vis-à-vis du silence.
mercredi 4 novembre 2009
Glissosophie
lundi 2 novembre 2009
La défaite en ses lieux(sur "Le Supplice de l'eau", de Percival Everett)
Le Supplice de l'eau tranche donc l'indécent fil narratif pour laisser parler la folie. Ismaël tourne autour du pot, du gouffre, il s'exile dans des dissertations minées, déploie des dialectiques vérolées, convoque Héraclite, Platon et autres, leur presse le logos pour en faire couler un jus d'inanité sonore; il lâche la bride aux mots, les laisse s'interpoler, se cannibaliser ("Pour m'occuper, haut lieu d'occrire, maquis suis écritvain, j'épris sept quasi hébétude, kelkel soi, malgré ce scissever averdissement.")
Ismaël est celui qui écrit le livre, et comme tel, il nous voit, nous, lecteurs, nous sait à l'affût de ses failles et éboulements – et il nous nie, nous conspue, nous prend en otage. Il bâtit et détruit des systèmes dans le même temps, pousse la syntaxe à son point de rupture, à son degré d'élocution maximale, fait rendre gorge aux mots. Tel un Hamlet à rebours, il hante les brumes de son livre et de maison, sevré dans sa chair, et ne craint qu'une chose, l'apitoiement.
Il est donc, aussi, question de vengeance. D'un homme qui cherche à changer un bourreau en victime afin de n'être plus cette victime vivante qu'a créé le bourreau en l'amputant d'un membre: sa fille. Il est question aussi d'un président estimé particulièrement crétin et d'un couple qui se liquéfie puis explose. On évitera de jouer au petit jeu des extrapolations, mais ici, pourtant, quelque chose de crucial est dit du rapport du citoyen à la torture.
La hantise d'Ismaël, c'est le paradoxe de Zénon, la certitude que tout, sa langue, son corps, sa souffrance, sa soif de vengenace peut être coupé en deux, puis en quatre, et ce à l'infini, sans que jamais rien ne disparaisse.
D'une liberté à toute épreuve, frondeur, épileptique, magnifique, audacieux, surprenant, le roman de Percival Everett fiche le feu au clavier de la tempérance et va plus loin que tous ces précédents livres. Mais il est vrai qu'Everett se réinvente à chaque roman, diable insolent sautant d'un ground zero à l'autre pour y édifier de furieux asiles où la pensée n'a plus qu'à griffer et mordre.
(Coup de chapeau à la traductrice, Anne-Laure Tissut, qui a su aider le monstre à divaguer en français.)
Sortie le 4 novembre.
A noter que Percival Everett sera à France à l'occasion des Belles Etrangères. Lisez le programme.
mercredi 14 octobre 2009
De nos yeux maternels ne craignez point les larmes
Evidemment, Tatiana de Rosnay n'est pas la seule dans ce cas. Et on peut supposer, espérer, que son cas sera réglé rapidement – il ne sera pas visiblement pas réglé assez rapidement pour qu'elle puisse se rendre aux USA où elle comptait assister au tournage du film tiré de son livre, Elle s'appelait Sarah. Alors, de deux choses l'une:
Soit les autorités comprennent que tout ça ne leur fait pas une très bonne publicité – Tatiana est connue, son père est un scientifique décoré de la légion d'honneur et de renommée mondiale… – et elles accélèrent et adoucissent les formalités. Dans ce cas, elles témoignent d'une tolérance par rapport à leur "nouvelle éthique" qui ne fait que souligner leur intolérance pour une population moins anonyme.
Soit elles restent inflexibles (et ridicules, et dangereuses), et attendent que Tatiana leur donne les preuves de cette fameuse nationalité française, ce qui ne peut que mettre de l'huile sur le feu.
Dans les deux cas, elles ne font que témoigner de leur "ligne": ratissons large pour ne pas être trop accusé de faire de la sélection. Car pour eux, qui dit nationalité dit sélection – et le mot "sélection" a un passé, comment dire… un passé tout sauf passé.
La loi estime que "La charge de la preuve en matière de nationalité française incombe à celui dont la nationalité est en cause. ” – mais visiblement, la nécessité de remettre en cause la prétention à cette nationalité est du ressort de l'Etat. C'est même devenu son passe-temps favori. Il faut dire que dans notre belle partie, le fait d'avoir un père prestigieux (je pense à Tatiana) ne vous garantit en rien le moindre passe-droit, sinon, où irait-on, on risquerait de tomber dans une version abâtardie du népotisme, non non non, ce n'est pas le genre de la maison.
Je crois me rappeler que mon père est né à Alger, donc "à l'étranger" (sauf si nos anciennes colonies ne comptent pas dans la rubrique "à l'étranger"… Pour l'île Maurice, c'est un peu compliqué, car les Anglais nous l'ont piquée en 1810 et elle fait partie aujourd'hui du Commonwealth des Nations…), mais qu'il, mon père, était français (enfin, je le suppose, car je ne lui ai jamais demandé de preuves, idiot que je suis). Je me suis rendu récemment aux Etats-Unis en toute impunité. C'est louche. Dois-je me réjouir ou m'inquiéter qu'on me laisse tranquille? J'ai comme l'impression que d'autres générations se sont déjà posé cette question à des époques point trop lointaines. Et que "se réjouir" était alors souvent modéré par la question "combien de temps encore?"
Néanmoins je garde confiance. En cas de conflit armé, ils cesseront d'être aussi tatillon et je suis sûr que nous aurons le droit d'aller donner notre sang pour madame la patrie sans avoir à leur coller nos empreintes digitales sous le nez.
jeudi 8 octobre 2009
Rayon Federman
"J'ai dejeûné récemment avec John Barth qui me disait avec une certaine amertume que notre travail -- les livres que ceux de notre génération ont écrits en bouleversant l'idée du vieux roman [exhausted] -- ne comptent plus -- c'est triste mais c'est comme ça."
Il était plutôt content de voir qu'ici, grâce à Laureli et quelques autres, la chanson continuait. La dernière fois que je l'avais croisé, dans une librairie parisienne, il m'avait parlé de son nez, bien sûr, mais aussi de la traduction de ses livres, entreprise croisée et infinie, mais aussi de la lumière qu'il voyait depuis sa fenêtre. Je ne sais pas pourquoi, mais je l'avais visualisé, cette fenêtre, ainsi que le soleil qui déconnait derrière à pleins tubes. On s'était dit à bientôt, parce que c'est la seule chose à dire quand on s'en va.
mardi 6 octobre 2009
Demoniak, Le feuilleton III
HAHA HA HA HA HA HA
– Mon Dieu, Sam, on nous observe!
– Sales petits voyous! Je vais leur régler leur compte!
– Alors, grand-père, tu t'attaques aux nourrissons maintenant?
– Après tout, c'est peut-être lui la nurse de la petite…
– Sales petits vauriens, je vais vous apprendre la politesse! Je vais tous vous tuer! TOUS!
– Tu as vu? Il s'énerve!
– Tu vas apprendre à tes dépens ce que sait faire un croulant devant des voyous à la mie de pain de votre espèce!
– AH!
– Et alors, petites crapules, toujours envie de plaisanter?
– Eh! Attention, il est armé!
– Garde ton calme, Ted!
– Vieux bouc! Je vais lui rendre la monnaie de sa pièce!
– Sam! Sam… Je t'en prie, partons! J'ai peur, Sam!
– Fiche-moi la paix, toi! Je veux donner une leçon à ces petits miséarbles!
TLAC!
– Retourne dans ta tombe, imbécile, tu pourrais prendre froid!
– AHHHGH!
dimanche 4 octobre 2009
Forcer le mufle aux océans poussifs
Toledo a le courage et l'intelligence de se demander comment penser une Europe qu'on suppose et espère débarrassée de ses deux piliers, la sélection des races et la lutte des classes. Car si ce grand ménage nous dévoile le danger de toute "eschatologie politique", il signe aussi le glas des rêves de "transformation collective".
Donc, nul regret. Mais un constat, qui appelle pensée et acte: "La pédagogie du XXème siècle, obnubilée par la non-reproduction des crimes, nous interdit d'expérimenter des avenirs possibles". Comme si le simple savoir du passé garantissait la conduite morale.
Toledo se sert alors d'arbres pour dépasser son propos. Après le rhizome deleuzien, qu'il connaît parfaitement, l'auteur a recours au hêtre, arbre européen par excellence, aux feuilles caduques, ce qui fait de lui un être-h, un h-être, qui s'inscrit très judicieusement dans la ligne de l'hontologie lacanienne et de l'hantologie derridienne. L'hêtre n'est pas seul: il a en face de lui le bouleau, cet arbre indissolublement lié aux temps concentrationnaires, tels que rapportés, entre autres, par Levi et Chalamov.
Les bouleaux coupés, pouvons-nous vivre à la seule ombre de l'hêtre européen? Toledo nous propose alors de lire ou relire un magicien nommé Oz, Amos Oz, ainsi que Kertész, et nous engage à penser l'acte de l'oubli, et la peur qui y est liée. Après les monuments, après les cimetières, que peut édifier la mémoire si elle veut affronter l'avenir? La réponse, le terrain de recherches est sans doute à guetter du côté de la langue. Et Toledo de rappeler l'énoncé suivant, signé Umberto Eco: "La langue commune de l'Europe, c'est la traduction". Non pas imposer une langue – on a vu et on voit ce que ça donne… – mais créer une "école du vertige", actualiser "la polyphonie des récits". Toledo termine son livre par des propositions, concrètes, enthousiasmantes. Il nous dit l'enjeu de la traduction, non comme machine à importer ou exporter des produits culturels, mais comme babélisation jubilatoire des savoirs encore éparpillés. Comme circulation dans un espace multiplié. Utopie linguistique? C'est précisément cela que cherche Toledo: la création d'une utopie comme moteur à la prochaine aventure européenne. On peut par ailleurs faire un tour sur le site de la Société européenne des auteurs, en particulier de ce côté-ci.
Que peut-on souhaiter à Toledo ? A cette question, posée un jour par John Jefferson Selve, l'auteur a répondu très clairement: "Des complices." Message reçu.
jeudi 1 octobre 2009
Demoniak, Le feuilleton III
– Je propose de commencer par la dernière pour éviter que les autres nous voient…
– Allons-y, mais n'oubliez pas de mettre un mouchoir sur votre visage!
– Pat a raison: ainsi personne ne pourra nous reconnaître!
– Oh! C'est formidable! Encore mieux qu'au ciné!
– Alors vous avez compris ce que vous devez faire: Ted ouvre la portière et moi je parle. Vu?
– Pouah! Tu as vu cette horreur? Partons vite où je vais vomir!
– S'il ne restait plus que des filles comme elle sur la terre, la race s'éteindrait vite!
– Essayons plutôt celle-là!
– J'espère qu'on ne va pas y trouver une autre femme-vampire comme tout à l'heure!
– Non! Cette fois-ci c'est un homme-vampire! Mais tu as vu la fille qui est avec lui?
– Oui! Tout à fait le genre que j'aime!
– Oh! Je t'en prie… je t'en prie, Sam! Que dirait mon père s'il venait à apprendre… Toi, son meilleur ami!
– Allons, allons, Suzy! Comment ton père pourrait-il imaginer que tu es sortie avec moi?
– Je ne sais pas… Mais s'il venait à l'apprendre quand même?
– Nous ferons en sorte qu'il n'en sache jamais rien! A condition que tu ne lui dises pas, évidemment…
– Moi? Mais tu es fou! Je préférerais mourir!
– A la bonne heure! Alors chasse ces mauvaises idées et viens plus près de moi!
– Eh bien! Elle n'est pas dégoutée pour embrasser cette vieille ruine!
mercredi 30 septembre 2009
Demoniak, le feuilleton II
– VOYOUS!
* SBAM *
– Dick! Note leur numéro minéralogique!
– Assassins! Voyous!
– Ce pouilleux a dû nous abîmer le pare-choc!
– Oui!… Et s'il continue à hurler, je fais machine arrière et je vais lui apprendre à vivre!
– Eh, Bill! Arrête-toi là, il y a un drugstore ouvert!
– Oui, tu as raison. Rien ne vaut une bonne bouteille de whisky pour chauffer l'ambiance!
– Ah! Ça fait du bien partout où ça passe!
– Eh, Ted! Laisses-en pour les copains!
– Bon, ce n'est pas tout ça, mais qu'est-ce qu'on pourrait faire?
– J'ai peut-être une idée à vous proposer…
– Ah! Patrick, tu es vraiment notre cerveau à tous!
– Tout près d'ici se trouve le parc d'Eastwood. A cette heure-ci, il pullule d'amoureux… Si nous allions y faire un tour?
– Excellente idée! Adoptée! Et en cherchant bien nous pourrions trouver une fille qui voudrait changer de partenaire… Ah! Ah!
– Je l'ai toujours dit que tu étais un terrible terrible, Pat. Il n'y a que toi pour avoir des idées pareilles! Ça c'est bien vrai! Si tu n'étais pas là, nous mourrions d'ennui!
mardi 29 septembre 2009
Demoniak, le feuilleton I
(Un bar dans la banlieue new-yorkaise…)
– Ouf ! Quelle chaleur… Et on s’ennuie à périr ici !
– Oui, je suis bien de ton avis… Qu’est-ce qu’on pourrait faire ?
– Bah !… Tu as un idée, toi, Ted ?
– Quelle vie ! Les jours se suivent et se ressemblent… Jamais rien d’excitant pour rompre la monotonie…
– ET si on allait lyncher des nègres ?
– Oh ! Ça va ! Change de disque
– Allez, venez, on va aller faire un tour en ville ! Il nous viendra peut-être une idée en cours de route…
– D’accord, Bill ! Mais appuie sur l’accélérateur et fais nous vopir ce que ta guimbarde a dans le ventre !
– Au large les croûlants ! Place aux jeunes !
– Ah ! Dis donc, on a dû ouvrir les cimetières pour qu’il y ait autant de vieilles croûtes dans les rues.
ROARR
(à suivre…)
jeudi 24 septembre 2009
Vit et D'Estaing
« Madame D. était accoudée au balcon de la chancellerie de S., encore chaussée de ces bottes d’équitation qui me rappelaient d’audacieuses chasses à cour, quand, un verre de montrachet à la main, je vins d’un pas alerte la rejoindre après un florilège de regards aussi éloquents qu’humides. Ses avant-bras crépitaient d’une chair de poule qu’on eût dit élevé au grain royal. Je lui susurrai quelques aphorismes non dénués de malice, puis glissai un doigt démocratique dans son soubassement régalien. Elle tourna son doux visage vers mes traits pharaoniques et, sa langue enjambant délicatement ses quenottes rustiques, m’invita à oublier la diplomatique réserve pour m’enseigner la mutinerie saxonne.»
Décidemment, je la sens bien cette rentrée littéraire.
mercredi 23 septembre 2009
Point de suspension
Publié par Flammarion en novembre 1954 dans la collection *Cœurs*. L’histoire est déchirante : une jeune femme voudrait se consacrer à l’écriture, après avoir remporté un prix littéraire (le prix Minerva), mais les finances familiales font qu’il vaudrait mieux qu’elle épouse un nanti. Le temps de la narration est le présent ; troisième personne du singulier. L’héroïne s’appelle Odette de Lymaille. C’est bon signe. L’intrigue débute avec Odette en panne sèche, sommée d’écrire un sonnet sur des chrysanthèmes. Grosse tension. La mère remet les pendules à l’heure : « La poésie et la vie, petite, ce sont deux mots qu’il ne faut pas vouloir mettre ensemble. »
Shit. Allons, il doit bien y avoir un paragraphe, une phrase à sauver. Cherchons. Ah, quand même, page 217: « Au siècle où nous vivons, la littérature est une marchandise comme une autre. Le public ne l’achète que si on la lui recommande. »
Il était temps que l’amour vienne.
mardi 22 septembre 2009
Heure Zéro
A-t-on jamais aussi bien décrit le phénomène sub-galactique de la lecture ?
lundi 21 septembre 2009
La voix au chapitre
"Poétique –
musique
∫
discours
Une intégrale
Limite inférieure le discours
Limite supérieure la musique"