mercredi 21 mars 2018

Traduction, piège à Macron

On le sait (ou pas): l'obsession des prix littéraires est ce petit sapin rabougri aux odeurs de cercueil qui cache la forêt des invisibles vivaces. Ainsi, il a été question il y a peu d'un "nouveau" prix de la traduction, mais qui, à la différence suppose-t-on des autres déjà existants, serait, lui, "grand". Un "grand prix de la traduction", pour célébrer en grandes pompes cette activité inégalement rémunérée qui n'intéresse globalement que les personnes concernées (et encore). Le président Emmanuel Macron, dont on ne saurait remettre en cause la passion pour la culture puisqu'il a déposé un crayon sur la dépouille d'un académicien, avait donc promis en fanfare de marquer le coup. Une date avait même été avancée: en mars, pendant Livre Paris, au vu et au su de toutes les personnes venues arpenter la plus grande librairie payante de France.

Mais bon, le problème, c'est qu'il aurait fallu s'en occuper de ce prix ! Organiser un truc, établir des listes, trouver des experts, imaginer une récompense (un crayon du poids du lauréat? une plume qui ait de l'aplomb?), etc. Trop fatiguant sans doute, et puis c'est quand même plus classe de snober tous les écrivains russes invités, non? Bref, que dalle. L'annonce se suffisait à soi-même, apparemment. Un bon coup de clairon vaut mieux qu'une charge au clair.

Mais qu'on se rassure (ou pas). Ce "grand prix" aura finalement lieu, nous assure le Royaume de Valois. Courant 2018. Ouf. On a hâte de connaître la date. Je propose qu'on fasse ça le 30 septembre, puisque c'est la saint Jérôme, patron des traducteurs. Bernard Pivot et François Busnel accepteront d'en être les parrains, ça va de soi. Douglas Kennedy, le plus grand écrivain américain vivant, le décernera. Laurent Ruquier invitera le lauréat à son émission en même temps que quelqu'un d'un peu plus connu. Le lauréat aura droit à une accolade, une visite sous la Coupole ainsi qu'à un séjour à Eurodisney. Et, cerise sur la gâteau, l'heureux récipiendaire du prix ne subira pas la hausse de la CSG. (Ah, zut, on m'informe que cette dernière faveur n'est pas possible. Bon, tant pis.)


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