Interviewé ce week-end par deux futurs Pulitzer du journalisme d'investigation, Nicolas Sarkozy a tenu des tas de propos judicieux et acidulés, dont celui-ci:
« La France est en grave difficulté et ce n’est pas l’arrogance de l’opposition qui va m’empêcher de la sortir de l’ornière en initiant des réformes douloureuses dont je ne serai peut-être même plus là pour cueillir les fruits ― ce qui est bien la preuve de mon immense courage et de mon désintérêt pour ces dérisoires échéances électorales dont les Français se fichent."
Cette phrase mériterait à elle seule une nécropole. On se contentera de noter la louable abnégation d'un président qui aurait pu cueillir les fruits de "réformes douloureuses" mais préfère accepter l'éventualité de n'être plus en mesure de goûter la saveur desdits fruits à l'heure de leur maturation. Certes, on aurait pu croire qu'il revenait aux Français de jouir de ces mystérieux agrumes chus au sortir d'un enlisement dans une ornière dont notre sauveur les aurait arrachés – les Français, pas les fruits – au prix de "réformes douloureuses", mais en fait, non. Et soudain on comprend! Ceux qui bénéficieront de cette cueillette ne peuvent qu'être les "restaurateurs", puisqu'ils seront les seuls à ne pas pâtir de la hausse de la TVA. Le message serait-il crypté? Ne faut-il pas entendre, par "restaurateurs", les futurs artisans d'une "restauration" davantage politique que gastronomique? Mystère. De toutes façons, les "échéances électorales" sont "dérisoires" et Sarkozy s'en fiche. Apparemment, il n'y a pas que le courage qui est immense, dans cette histoire.