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On ne s’habitue pas à Bessette.
On ne l’apprivoise pas. Elle est dévoration, esquive, feu follet, ni Duras ni
Stein, mais seule comme Artaud, mais autre, otage d’une langue qui réinvente la
liberté en shuntant, au sens électrique,
le courant syntaxique imposé par la frivole aventure romanesque. Chacun de ses
livres met à mal l’histoire littéraire, anticipant des ruptures qu’on croyait
acquises, innovant en marge et à la barbe des bateleurs et bricoleurs à peine
naissants. Elle est, dès les années cinquante, la folle dans le grenier
narratif, la souris dans le moulin à parlotte, celle qui pense en actes les
noces un peu chiennes du récit et du poétique. Peu lue, peu commentée, à peine
soutenue, elle fait de sa singularité un avant-poste à occuper par ceux qui
viendront, qu’ils l’aient ou non découverte, et là n’est pas la moindre ironie
de sa fortune contrariée.[…]"
C'est le début d'une postface que j'ai eu le plaisir de rédiger pour le roman d'Hélène Bessette
Si
à paraître mercredi 1er février, donc demain, dans la collection LaureLi. Comme l'écrit son éditrice, Laure Limongi:
"Si est la suite de N’avez-vous pas froid et de la manière d’autofiction bessettienne. Après son divorce douloureux avec un pasteur, l’héroïne – ici nommée Désira – se retrouve seule dans un petit appartement, dans la France conservatrice des années 60. Une femme divorcée y est mal vue. Une femme divorcée qui reste célibataire et aime aller le soir au cinéma, encore plus. Bien décidée vivre sa vie comme elle l’entend – dans les limites de la bienséance –, Désira est l’objet des rumeurs les plus désobligeantes. On la pense femme de mauvaise vie multipliant les amants, avortée, alcoolique… elle qui ne cherche qu’à traverser la vie en respectant l’originalité anodine qui est la sienne. Elle se met donc à envisager le suicide comme seule issue possible. Le talent de l’écriture bessettienne évoque cette terrible idée avec l’humour noir qu’on lui connaît. Et le livre développe des scénarios de désespoir plus hilarants les uns que les autres, brocardant l’absurdité des conventions sociales, la bassesse des petits sentiments, la méchanceté commune de l’être humain. Martyre mais souveraine, Désira brille de l’éclat de la passion et de l’intelligence."
En outre, Sophie Quetteville, de la librairie Le Genre urbain (60 rue de Belleville – 75020 Paris) m'a invité, ainsi que Julien Doussinault (biographe de Bessette) et Laure Limongi à venir parler de l'auteur et de son œuvre à l'occasion de la parution de Si. Ça se passera le mardi 14 février 2012 à 20h.