Bernard Collin – cet art de syncoper le jour et ses pensées pour mieux qu'advienne une fluidité inédite, les dits et les rumeurs du monde tressant avec les saillies intérieures un paysage mental soudain concret, et cette percée continuelle du langage, ces galeries creusées dans le latin, ces reprises du réel qui en font la peau de tambour sur laquelle chaque mot cherche écho —
Franck Venaille – l'errance de l'ancien enfant, par monts et rues, frotté ici aux berges d'un fleuve-mémoire, carambolé là dans le lacis d'un arrondissement natal, et la longe des phrases jetée dans le vide à venir, les stases dans la chambre des morts et des amours, le chœur des dernières cavales, et cette voix sans cesse s'éveillant à la nuit —
Mathieu Bénézet – le corps en torture apprenant de ses chutes, chassé des récits mais s'y réfractant à contre-cœur, mâchant grammaire, la langue en bouche comme une bête en cage, qu'il faut tisonner, et tisonner encore, à jamais écorché dans les prononcements –
Bernard Chambaz – des guirlandes d'été déposées sur la tombe impossible, le tourbillon des lieux où sans cesse revenir au fatal oméga, élégie pourtant solaire, tournant sur l'axe-fils, faisant le compte heureux et malheureux des heures à enrichir, ce entêtement à relancer le dé du dire, un élan, un élancement –
Claude Esteban – une éternité brisée en plein jardin, près d'une route saignée, l'œil guettant dans les herbes autre chose que des signes noirs, se souvenant d'infimes soleils, des pans de texte dressés au seuil de la douleur, lente coulée au soir
Jean-Louis Giovannoni – une cascade, un éboulement, et toujours des questionnements, dialogues avec des anges déchus, parler au monde, à ses heurts, ses mystères, louvoyer entre fantômes, attiré par le miroir de l'intérieur, appelé par le vertige du dehors –
Cédric Demangeot – le combat avec le trou, et marcher sur des os, danse trébuchée, la phrase cassée pour mieux dire la cassure, souvent la rage, au ventre à la langue, quête avortée violemment de tout évitement, suppliciations (bien sûr), le texte en poing qui cogne en précision –
C'est magnifique. D.
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