L'automne est là, souviens-t'en, c'est l'éternité avec le soleil sur la plage abandonnée, alors remets du rimmel à tes cils et tant pis s'il fait un temps déraisonnable, tant pis si le ciel est bas, est lourd, s'il pèse comme un couvercle, le cou coupé, puisque la joie vient toujours après la peine, paraît-il, il paraît, le voici, le voilà, le rappel des livres chroniqués dans mon Feuilleton du Monde des Livres depuis le 25 août — tous ces titres sont encore en librairie, vous pouvez également les commander (ça empêche votre libraire de rouiller), bref, faites votre marché, et n'hésitez pas à me dire si vous êtes satisfaits ou très satisfaits (si vous êtes déçus par ces conseils de lecture, adressez vos plaintes à sainte Rita):
1/ Ben Lerner, La haine de la poésie, traduit de l’anglais (Etats-Unis), par
Violaine Huisman, éditions Allia, 7€ — L’auteur de La
haine de la poésie s’attache dans cet essai à répertorier les divers
types de méfiances et d’aversions qui entachent la pratique du luth. Sa
méthode, à la fois pédagogique (les exemples abondent) et sincère (il se répète
un chouïa, mais c’est pour la bonne cause), est assez réjouissante.
2/ Grégoire Bouillier, Le Dossier M, livre 1, éditions Flammarion, 24,50€ – Bouillier, juge de Grégoire ? Possible. Mais un
juge blessé, un Quichotte sans casque, heureusement doté d’un redoutable esprit
d’escalier.
3/ Marie-Hélène Lafon, Nos vies, éd. Buchet-Chastel, 15€ – La phrase piaffe et rue, animée d’une cadence
versatile qui procède par d’infimes vertiges syntaxiques, une cadence dont il
émane, pour reprendre une expression de la narratrice, « une grâce
tenace ».
4/ Marie Berne, Le grand amour de la
pieuvre, illustrations de François Ayroles, éd. L’Arbre Vengeur, 14 € – Un chant subtil, une ode sensuelle, où non seulement est dévidée une vie vouée aux visions voraces qui vivotent sous la vase
(et vlan !) mais où la langue épouse les gesticulations d'une « jouisseuse
avertie ».
5/ Mika Biermann, Roi., éd. Anarchasis, 17€ – Biermann s’avance en conteur mais opère en peintre. Il
agite la toge, certes, mais c’est pour que ce taureau de lecteur entende, dans
chaque grain de l’arène, le sang.