mercredi 8 août 2012

A cœur ouvert

Le film de Marion Laine, A cœur ouvert, est sorti aujourd'hui. La diversité des réactions est stimulante. Car ce film, par son âpreté et son intransigeance, n'est pas de ceux qui viennent conforter la démarche du spectateur qui entre en salles, l'été, pour se gondoler ou entendre brailler les armes à feu. Il propose une image du couple qui dérange, puisque ces deux-là, Javier et Mila, en plus d'opérer des cœurs, laissent le leur rugir à chaque instant de leur passion, contrevenant ainsi à la sacro-sainte règle bourgeoise qui veut que l'amour s'écaille avec le temps. Du coup, leur passion dérange, et d'aucuns la taxent, avec une clairvoyance qui les dépassent, d'immature. Bien sûr qu'elle est immature, puisque les deux personnages ont décidé de grandir dans leur amour et non dans l'obédience aux diktats sociaux – d'abord on s'enflamme, puis l'habitude émousse, etc., mais c'est pas grave, l'important est de consommer. Eux préfèrent consumer, avec le risque encouru et la destruction possible. Mais tout cela était, est, dans le livre écrit par Mathias Enard. L'adaptation y a puisé des forces vives et incandescentes, plutôt que de coller à la sismographie du récit. De là cette caméra nerveuse, impatiente, qui suit les corps plus que leurs mouvements, et semble comme entraîné dans leur trajet de comète. Ouvrir des corps: telle est l'aventure, ici. Fendre leur peau pour percevoir l'irradié battement du cœur, qui est organe, moteur, machine, et non fade fruit. Le film, qui tient autant de la boxe que de la chirurgie, ne lâche pas le morceau. Il force la grâce à percer la membrane de l'attente, pousse des épaules pour rejoindre la joie inédite de ceux qui mettent leurs caresses au-dessus des habitudes. L'animalité, ici prégnante, têtue, ouvre la voie. Les corps se mêlent aux souffles, la chair tient à la chair, on veut étreindre, pas calmer le jeu. La catastrophe, on le sait, est imminente, elle l'a toujours été, et la vie n'est pas un caddie qui roule dans les allées de l'entendement. Il faut se battre, battre son amour, battre les heures, pour que coule le fluide du désir. Le rire cascade de Mila, les grognements suppliques de Javier sont des sons qu'on entend peu au cinéma. Ils sont le gage d'une force invisible, qu'il faut pourtant filmer. Pour cela, la réalisatrice a joué à l'extrême avec les couleurs, inventant un univers chirurgicale où le bleu se réinvente dans le noir et blanc de la tension, intensifiant tous les mouvements – spirale des escaliers, fuite ondulée de la moto, ballet des doigts suturant la plaie – et réveillant les matières – le mur qu'on explose, la robe qui danse, les roses qui se réveillent, l'eau qui noie et sauve. Une chanson vient, s'en va, puis revient. Besame mucho. Pas le standard éprouvé, mais sa version en français, ce fil rouge qui de nouveau saigne:
Dis-toi que c'est le désir éternel qui s'envole
Vers toi que j'appelle les yeux ouverts dans la nuit,
Malgré l'heure qui fuit, quand tout bas je redis :
Besame, besame mucho…

A Cœur ouvert n'est pas l'histoire d'une passion destructrice, en dépit des apparences. Car la passion ne détruit pas. Elle fait des films. Et oppose à la bêtise du monde la lumière affolée de son éternel retour.

3 commentaires:

  1. Très mal écrite votre critique, vous vous perdez.

    RépondreSupprimer
  2. Oui c'est assez cochonné, mais soyons indulgents, ça ne doit pas être simple de dire quelque chose de vraiment approprié sur le travail d'un proche.

    Sinon, quelqu'un a-t-il vu le film ? Est-ce que ça vaut l'extorsion de 10 euros ?

    RépondreSupprimer
  3. Bien écrite ou mal écrite, mais qu'est-ce qu'on s'en fout ! L'objectif est atteint, j'ai envie de lire le livre de Mathias Enard et de voir le film.
    J'aimerais bien me perdre plus souvent pour découvrir encore plus de choses, hé hé.

    RépondreSupprimer