Il se trouve que j'ai publié, en tant qu'éditeur des éditions Inculte, un texte de Donatien Leroy, intitulé Sisyphe. Un geste simple, pour mettre en lumière un texte qui me semble mériter plus qu'une attention, un texte qui pour aller dans le sens d'une éprouvante radicalité, me semble pour une fois avoir sa place dans le fragile panthéon des textes qui agitent la langue et dévient nos façons de lire, un texte qui trouble, dérange, déplace. Ce qu'est censée faire la littérature. Ce qu'a fait, en mon sens, le magnifique Musée Marilyn, d'Anne Savelli.
Et alors, me direz-vous? ? Ne sommes-nous pas abreuvés de livres supposés faire bouger les lignes? Non. Depuis des années, plus rien ne se passe qui nous bouleverse. De très bons livres apparaissent, puis disparaissent, et seule la poésie semble avoir repris le défi de la langue déprise. Nous avons soif d'ouvrages bouleversants. De livres qui telles des briques laissent un semblant d'empreintes sur le fragile ciment de nos vies. Sisyphe, je crois, fais partie de ces livres qui prend tous les risques à notre place.
Il ne plaira forcément à tout le monde. Il est aride et rude comme nos vies au lever du jour, mais explose lentement au fil des sept jours qu'il ose décompter. Il a l'air de chier notre quotidien, brosse à dents après sortie de poubelle, mas le sujet est vite celui de la mort d'un père qui bouleverse l'intime calendrier d'un être – et quand vous le lirez, une fois passée la sensation d'être l'éternel vous-même de votre agenda, vous vivrez l'errance absolue d'un fils amputé de père —
Libraire, lecteur, critique: bouge, enfin bouge! Ce livre ne se raconte pas ? Et alors? Crois-tu que j'ai à cœur de te rendre la vie facile ? Lis. Entre. Pénètre et ressors. Tant de livres vivent sans toi. Celui-ci a besoin de toi, car nous voilà rendus en des temps où la littérature isolée immense inflexible attend de toi autre chose qu'un simple coup de cœur.
Demain même je demanderai à Hugues de me réserver un exemplaire dans lequel je me plongerai sans œillères ni parti-pris dès mon retour à Paris - tout en ayant plus que jamais présent à l'esprit que "la table rase est une bêtise [...]chaque livre, à chaque fois, est un salut aux pères et une insulte aux pères, une reconnaissance et un déni", comme le disait si bien mon presque jumeau Michon...
RépondreSupprimerDès que je touche mon RSA, je le commande dans ma librairie préférée Jeffe :-)
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