Daniel Foucard récidiviste: avec Civil (à paraître début janvier 08 chez LaureLi), l'auteur de Cold se paie la tête de la police au sens littéral, moyennant un dispositif redoutable. A peine la première page tournée nous voici dans le centre de formation de la police nationale. La tempête sous le képi peut commencer. Quelques jours pour sonder les motivations des candidats, évoquer les techniques d'arrestation, prendre le pouls de la loi. L'homme qui mène ce séminaire peu orthodoxe a des idées bien arrêtées, mais pas franchement menottées. Plus philosophe que maton, il répand quelques idées toxiques chez les bleus. Au début, les candidats ne sont pas très "réactifs". Mais à mesure que notre instructeur avance dans les méandres éthiques et politiques de sa conception de la loi et de ses modes d'application, les langues se délient, à défaut des cervelles. C'est Ubu-Cop. Qui nous apprend qu'un civil est un "client", qu'un policier a mission d'incarner "la liberté et la viabilité"… Face à des recrues cherchant à éponger leurs névroses dans le maniement de la matraque, l'Instructeur regorge de conseils. Dira-t-on qu'il dérape, usurpe, abuse ? C'est plus compliqué. Foucard, s'il génère chez le lecteur un ricanement nerveux, évite la gaudriole et la caricature, tout en les lorgnant dans sa mire parfaitement calibrée. Il travaille la matière malléable et ô combien loquace du malaise. Ses postulats ressemblent à des mines anti-personnelles. Son esprit d'escalier est pavé de savons. On laissera au lecteur le soin de découvrir les ressorts de cette farce à double ou triple détonation. Il y avait le "politiquement incorrect"; il y a maintenant le "subversivement incongru". C'est plus efficace et plus subtil.
Il y a une base incompressible de délits et c'est presque rassurant, la preuve qu'on conserve une marge d'initiative en tant que civil, fusse une initiative de merde. Cette base c'est un peu comme le plein emploi: à 5% de chômage, on crie victoire, à 5% de délits, on crie victoire.La drogue, les trav, la syndicalisation des détenus, l'arrestation d'un ministre, l'effet de surprise de la violence, les communautés sexuelles… Comment interpeller un chien? survivre en milieu hostile? Et surtout, à quoi sert le papier-bulle quand on est trafiquant? Foucard au rapport!
"Il y avait le "politiquement incorrect"; il y a maintenant le "subversivement incongru". C'est plus efficace et plus subtil."
RépondreSupprimerC'est une bien belle formule...
BUBBLE WRAP SMUGGLE
RépondreSupprimerLe papier-bulle est une substance marine qu'on extrait directement de l'écume en pressant du jus de vent. Le mélange obtenu est ensuite savamment oxydé, puis poli et tanné, éventuellement bronzé suivant les milieux sociaux-culturels auxquels il est destiné. Pour des besoins exclusivement liés à la satisfaction de la clientèle, on le burine afin de lui donner une patine dite baroudeur, très en vogue actuellement dans certaines couches aisées de la population. La fin du process consiste en une voire plusieurs injections de fictions plus ou moins parfumées afin de doter cette enveloppe d'un historique vaguement intéressant, pedigree surfait et entièrement fictif mais qui présente l'avantage notoire de distraire les clientes, ce qui leur évite moultes désagréments, au vu des oscillations palpitantes - non, pas hystériques, restons modestes - de leurs systèmes nerveux ainsi que des difficultés rencontrées par elles dans leurs tentatives d'obtention d'une licence adulte. Le papier-bulle est un produit d'excellente qualité, à l'autonomie reconnue, d'une durée de vie oscillant en moyenne entre 50 et 80 ans sauf exceptions et dont les qualités biodégradables après usage sont reconnues par l'ensemble de la profession.