vendredi 24 avril 2015

La traversée des épreuves

Les épreuves de mon nouveau livre sont arrivées. Se lire  / se relire
écrire / réécrire
mais sans rage
sans regret
à la bonne distance
à mi chemin du lecteur qu'on redevient
et de l'auteur qu'on n'a plus besoin d'être
à la fois juge et témoin
point et cercle
corriger
puis
laisser
laisser partir…



… et pour faciliter ce "laisser partir", le mieux bien sûr consiste à s'égarer déjà dans un autre projet, à s'enfoncer dans d'autres eaux afin que le livre fini s'autorise à devenir île, où d'autres viendront s'échouer,

se relire, donc, depuis le livre prochain, le livre en cours, comme sur le pont d'un bateau on voit passer un bois flotté qui semble reculer alors même que c'est nous qui avançons

se relire, puis signer
le bon à tirer
— bon à s'éloigner

7 commentaires:

  1. Et considérer déjà que l'objet qui est livre posé là à côté de vous ne vous appartient plus, ne vous concerne plus... Un moment très particulier, celui pendant lequel V. Woolf entrait généralement dans une crise dépressive. Ce qui ne sera pas votre cas car "l'autre projet" est un nouveau rebond...

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  2. Le bon à se tirer, donc.

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  3. Je me souviens que tu m'avais envoyé en avant-première ton monumental "CosmoZ" avec une fort belle dédicace (mais ça, c'était avant...) Je dis ça, je dis rien, mais salut au bon entendeur! - lol

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  4. Marrant cet objet du Bronze sur la page, ils se tiennent et se regardent ne sachant trop comment lâcher prise.

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  5. Il n'est pas sûr que les circonstances m'autorisent une île même pour une courte parenthèse en récompense à l'année mais je vous promets de ne pas passer l'été avec Montaigne, de vous quelques livres en attente, je les sors du garage à la prochaine escale.

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  6. je comprend tout à fait ce moment quasi magique qu'est la réception des épreuves. la fin ou l'aboutissement de quelque chose, mais en même temps la hantise de laisser passer des énormités (même si les protes et correcteurs sont passés avant).

    dans le dernier numéro du magazine littéraire "les pervers", deux articles sur les traducteurs (G.A. Goldschmidt) et l'Ecole de traduction littéraire (A Markowicz) (+ un livre 3 essais sur la traduction de J.F. Billeter). drôle de métier que la traduction. indispensable traducteur pour faire connaître (co-naître), facilement poussé au contresens (involontaire), et ignoré souvent du lecteur.

    et pourtant les lectures dans le texte et dans la traduction sont deux choses vraiment très différentes.
    il m'est arrivé de lire dans le texte, avant traduction, pour donner mon opinion si cela en valait la peine. il m'est arrivé de lire dans le texte, pour moi, par plaisir de la découverte (ce fut le cas de A Naked Singularity, signalé au passage, mais aux droits déjà préemptés).
    il m'est aussi arrivé (plus souvent) de lire dans le texte (mais c'était professionnel).
    et pourtant le processus est à chaque fois différent. quand on lit on ne traduit pas, c'est un travail supplémentaire qui est demandé (et que je n'aurais pas envie de faire). tout se passe dans la tète et la musique du livre reste dans la tète.

    un peu comme pour les épreuves, les relire c'est déjà les oublier.
    discutant un jour avec Antonio Lobo Antunes lors d'une rencontre littéraire (où peu dans l'assistance avaient lu ses livres...), j'ai été fort surpris qu'il ait en partie oublié des passages de ses livres : il était déjà plus loin (d'autant plus loin qu'il y avait eu la traduction).


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