jeudi 31 janvier 2008

Perso Peau Lisse


Qu'est-on quand on n'est plus quelques mois durant qu'un crépitement palpitant sur le claquant clavier? Deadline oblige, je me dois de faire crépiter le Mac de quatre heures du matin jusqu'à claudication des phalanges vers les dix-neuf heures, et ce pendant encore trois bons mois sonnants et trébuchants (programme: pynchon, seth, j. eric miller, berberian…). L'énergie, bizarrement, fusionne avec l'épuisement. L'aube joue les soirs. La nuit sent le crépuscule. Qu'est-on, franchement (Kaiton, pâle divinité sans disciple ni culte) ? En instance d'autre chose. En devenir. A fleur de peu. Allez, je vous dis pas. Dès mi-mai, j'arrête de jouer les couteau-suisse. Je me pose. Me repose. M'impose un rythme plus coulant: dix heures d'écriture par jour maxi. Eloge du farniente versions stakhano.

Mouton Mainard Matins



Les Petits Matins abritent une sourde, une interlope niche nommée "les grands soirs", collection dirigée par Jérôme Mauche dont on a dit ici le plus grand bien. Parmi ces titres magnanimement vespéraux, on a lu, à nos heures délictueuses, Delanda ouest de Joseph Mouton et La Blondeur de Cécile Mainardi. Mouton aime le risque: sous couvert de bio-dégradante égopopée, il nous narre ses jours et ses pages, en écrivain épris de "syntaxes rotatives", de "squelettes phrastiques", et autres camisoles jubilatoires. Bien qu'inféodé à d'impérieux algorithmes, Mouton sait laissr sa langue varier et avaler les situations. S'accrochant à ses projets, il noue des phrases qu'on admire et n'arrive pas à découenner. Mordant la table du réel tout en devenant la mite qui ronge ses pieds, interpellant ce qu'il refuse de devenir, Mouton passe et récidive, avec une insolence qu'on souhaiterait presque à ses propres chauchemars. La Blondeur est une exploration par strates successives et contradictoires d'une nuance galvaudée. Donc: l'exposition d'une couleur qui peut tour à tour investir le capillaire comme l'imaginaire. Libre comme l'air, mais comme ce dernier sujet à de drastiques indications ondulatoires, la prose de Mainardi passe et repasse par le même et sa différence, jusqu'à épuisement ou presque de ce qui n'est ni châtain ni bru n ni roux. Ces deux textes ont une particularité commune: leur lecture vous titille l'écriture. Comme si la suite était inscrite dans leur prédicat.

Moondog


Les éditions de l'Attente publient dans leur collection SPOOM un texte intitulé Moondog Légende, signé Pierre Hild. Partant d'une shadow-icône – ce musicien pop-viking dont on possède heureusement d'interlopes traces sonores –, Hild, par pixel-touches biograhiques, au moyen d'une lente défragmentation, permet au mythique Moondog de surgir en moins de quarante pages. Oscillant entre un factuel ténu et une vision chamanique, l'auteur raconte l'errance, la déchéance, la têtue survie de ce troubadour énergumène aux influences… disons, multiples. Remarqué par Joplin et Philip Glass, entre dix autres, le barde absurde s'inscrit dans cette christomathie des us desperados dont on ne saurait se lasser. Bref, si l'expression "clochard céleste" a un sens pour vous, ne ratez pas le minimal Moondog Legend de Pierre Hild. Il vous donnera presque l'impressio que Dylan a été rêvé et New York inventé. Un court mais exigeant moment de grâce.

Vaches


P.O.L vient de publier Vaches, de Frédéric Boyer. Et Frédéric Boyer vient de traduire les Confessions de saint Augustin en Aveux. Quel pas mène de pâture à confesse? Ou plutôt: qu'est-ce qui, en nous, ne cesse de ruminer? Dans Vaches, Boyer oblige la langue à épouser la pierre de sel de la disparition. Celle de ces bêtes impensantes projetées hors notre conscience. La vache dont nous parle Boyer est tout à la fois la masse sourde plantée dans le pré et l'absente de nos bouquets ruminants. Elle est ce vent investi de vie que nous en voyons pas. Que nous ne voyons plus. Les vaches se pressent contre la clôture de notre iniquité. Est-ce à dire que Boyer fait de la vache un symbole, une icône, l'élément d'une équation? Non. Boyer laisse la vache aller à notre oubli comme au champ. Il la laisse le/nous conduire hors la page, comme Artaud et Homère avant lui, vers un sombre abattoir qui nous mérite. Au merlin nous voilà condamnés, nous qui avons renoncé à toute spiritualité bovine. L'écriture de Boyer, qui a l'acuité d'un Chevillard et la prescience d'un Guyotat, nous apprend, in extremis, un douloureux mais nécessaire penser-vache. Une "constellation céleste", dit Boyer. Mais peut-être Boyer n'utilise-t-il que le mot "vaches"? Peut-être n'en presse-til que la pulpe abstraite et cependant juteuse? La gravité de ce livre tient à cette évidence d'écrivain: l'objet tenu à bout de main ne se réduit pas à sa monstration. Il se laisse "traire" de son sens. Pour remplir d'autres seaux plus profonds. Texte mystérieux, texte religieux, Vaches, en soixante pages, piétine le peu de suffisance qu'il nous restait.

Un Cœur simple, la saga


UN CŒUR SIMPLE
Un film de Marion Laine
Avec Marina Foïs, Sandrine Bonnaire, Pascal Elbé, Noémie Lvovsky
Durée : 1h45
Date de sortie : 26 mars 2008


Une première critique sur le film de Marion Laine, Un Cœur simple (sur les écrans le 26 mars):

"Adaptant librement Un Cœur simple, le sublime conte de Gustave Flaubert, Marion Laine signe avec son premier film une œuvre pleine de maîtrise et d’espoirs pour l’avenir. Suivant Félicité, domestique aimante dans une Normandie aujourd’hui disparue, Un Cœur simple développe le récit d’un délaissement et d’un isolement progressifs que marquent trop de blessures supportées - celles d’attachements qui ne font que se défaire. "

Pour la lire la suite, fort élogieuse, et sur 2 pages, c'est .

mardi 29 janvier 2008

Radiohead (techniquement parlant)



Place Aux Fous !


Vendredi 1er février 2008
sur Radio Libertaire 89.4 FM -
13h00 / 14h30

Olivier Pascault, Valentin Schaepelynck et Charlotte Hess reçoivent Claro, écrivain / traducteur, à l'occasion de la sortie le 7 février aux éditions Verticales de son nouveau roman, Madman Bovary.



écoute en direct : http://radio-libertaire.org:8080/radiolib.m3u

écoute en différé (lien valide 1 semaine) :
http://backup.radio-libertaire.org - (onglet vendredi, puis onglet
place_aux_fous)

jeudi 24 janvier 2008

Un Cœur simple (le film)


Marion Laine, vient de réaliser son premier long métrage. Il s'agit d'une adaptation d'Un cœur simple, le conte de Flaubert. Sandrine Bonnaire y joue Félicité, Marina Foïs Mame Aubain, il y a aussi Pascal Elbé, Patrick Pineau, Bruno Blairet, etc. Ça sortira sur les écrans le 26 mars. Si vous avez aimez Sans toit ni loi d'Agnès Varda, Sous le Soleil de Satan de Pialat, si la Correspondance de monsieur Gustave vous tord les tripes et vous secoue l'intellect, si vous pensez que le destin d'une humble et passionnée servante du XIXème siècle peut résonner aujourd'hui, si vous aimez Le Bernin, Cezanne, Renoir père et fils, si vous préférez Tarkovsky à … [ rempissez comme bon vous semble], si vous suivez Alain Cavalier, si vous avez refoulé des larmes en voyant The Hours et aimez vous noyer dans Fassbinder: welcome. En tant qu'époux, je jouis d'une objectivité à toute épreuve – paradoxe, certes, mais n'oubliez que qui aime follement est censé châtier rudement. Ce film est magnifique. Il est rare qu'un cadre, une lumière et une adaptation aussi ambitieuse parviennent à un tel résultat. Pour avoir suivi ça de près, pour avoir été sur le tournage, vu les décors, causé avec les (superbes) comédiens et les (très chouettes) techniciens, ,je peux vous dire que c'était exceptionnel. Produit et distribué par Rezo, ce film devait être à l'origine produit par Béatrice Caufman, décédée il y un an., mais encore si vivante dans nos simples cœurs que son rire, ici, résonne en fond… C'est à Béatrice qu'est dédié, in fine, mon roman Madman Bovary. Tout est dans tout et Flaubert itou. Mais bon même si je n'étais pas de la partie, je m'arrangerais pour rencontrer cette Marion Laine qui vient de réaliser un film selon mon cœur complexe. Je la séduirais. Et je posterais sur mon site. Non mais.

Ô Champs Elysées…


Oui, je sais, c'est illisible. Mais bon, ça fait longtemps que vous étiez prévenus, non? Allez, on fera des piqûres de rappel pour les addicts… [Cela dit, ami bloggeur, si tu cliques sur le carton ci-contre, ta vue devrait gagner quelques points…] Sinon, avis aux moteurs de recherches, quelques termes susceptibles de retenir l'attention des internautes du monde entier: sodomie nichon carla exocet loi fillon musulman bush supervixxen revue inculte la croix bruni escroc malversation iPod carlos berlin alexanderplatz bovary fausto garp odot werli ezine eskimo lingerie sexxx penis enlarger – bon, je crois que j'ai fait le tour, si j'ai oublié quelqu'un contactez les labos pharmaceutiques schmul qui nosu harcèlent de leurs offres affriolantes… Et une petite précision: oui, je donnerai un entretien [et] je ferai une interview. Les deux. Mais seulement si vous êtes pas sages.

The Residents (ad libitum)


Le problème, quand vous décidez d'écouter l'intégrale de The Residents en commençant à quatre heures du matin avec sous vos pattes un clavier qui réclame du Pynchon, c'est que tous les problèmes disparaissent. The Residents ont l'avantage de derréaliser tout ce qu'ils touchent et même ce qu'ils ne touchent pas. Très vite, vous avez l'impression d'être entré dans un cabaret géré par des spinozoïdes imbibés de ce que vous avez bien du mal à trouver sur le marché. Même votre propre voix vous paraît anormale au bout d'un moment. Tout semble se fendre en deux comme un accordéon ayant trop copulé avec des magic mushrooms. C'est délicieux. Une vraie torture consentie. Soudain, c'est-à-dire au gré d'interminables dérives post-kantiennes, vous piges: c'est l'antidote ultime. La musique paniquée de l'intérieur. Le pli qui tue. Autant Sonic Youth me rastaquouère (id. est: me racle le cuir), autant The Residents me défibrille le cervelet jusqu'à décrochage du jugement, voire apnée critique. Ces anti-beatles indémixables m'apeurent. C'est mon La Borde sonique. J'y cotise abondamment. Plutôt couler qu'être cool.

Le style c'est l'ohm


"C’est en cela que Pynchon se révèle un styliste d’exception, c’est-à-dire un écrivain capable de créer des structures syntaxiques inédites obéissant à une rythmique singulière et recourant à un lexique décalé, toutes opérations visant à l’émergence, chez le lecteur, de sensations et de pensées inédites elles aussi – capable, donc, d’inventer une grammaire en devenir, susceptible de paraître absconse ou artificielle, mais uniquement parce qu’elle nous est absolument étrangère, confirmant par là la formule de Proust : « Les beaux livres sont écrits dans une sorte de langue étrangère » On ne s’étonnera donc pas de voir la prose pynchonienne souvent accusé de pécher par excès d’artifice, ou d’être, mystère incongru de la critique littéraire, jugée « trop cérébrale ». Le fait est qu’on ne trouvera pas dans l’œuvre de Pynchon une seule phrase éprise d’anodin, la raison en étant que l’auteur considère la langue non comme un médium commun visant à titiller des sensations partagées, mais à prendre à revers les effets de lecture, à parer d’un air de charade des énoncés sur lesquels on aurait tendance à glisser si leur identification était par trop accentuée. Précisons, et rappelons, que cet art d’essence chamanique, et subversive, est indissociable d’un humour subtil, non point surajouté, mais révélé, inhérent aux motifs qu’il expose et complexifie. « Same thing, only different », comme aiment à le répéter certains de ses personnages, en un clin d’œil possiblement nietzschéen. Retour différé du même, re-visitation de l’étranger, exploration de l’inouï – la prose de Pynchon, qui dans Face au Jour, use et abuse de l’under-statement, des circonvolutions et tergiversations sémantiques autant que syntaxiques, sait donc se moquer, aussi, d’elle-même, l’auteur n’hésitant pas à se pasticher, à forcer certains de ses traits, conscient du risque encouru par tout style parvenu à l’acmé de sa perfection. D’où le côté irrémédiablement potache de l’écrivain Pynchon, son goût des calembours, des chansonnettes, son attrait pour les geeks en tous genre, le cirque, le cabaret, les saillies drolatiques, la magie de quatre sous ; de là également cette fascination pour le mystique qui reste indissociable d’un ridicule sans cesse décliné. Pynchon écrit toujours au bord, à contre-jour, tout contre, dans les interstices, à la faveur de, malgré, au détriment de – délaissant le frontal pour le biaisé, outrant l’obvie pour mieux le déréaliser. "
(Extrait d'un essai in progress)

mercredi 16 janvier 2008

Catacastrophe

"Je ne jouis pas d'une capacité physique suffisante pour parler directement aux habitants de la localité où l'on m'a inscrit comme candidat aux élections de dimanche prochain. Je fais ce que je peux : j'écris", a déclaré Fidel Castro, 81 ans.
Putain, il manquait plus que ça… Que tous les écrivains se reconvertissent fissa dans la dictature!

mardi 15 janvier 2008

Boudiou, mais c'est Badiou!


Oubliez Deleuze, Lyotard, Foucault! Nous avons Badiou. Compte-t-il autant? Il suffit de lui demander. Profitant d'un bel accès de parano, l'homme fait le point sur sa candidature à la gloire: "Pourtant, un jour, on vous envoie des porte-flingues. Parce qu’on sait que vous êtes devenu le philosophe français vivant le plus traduit et le plus demandé, et de loin ? " (Libération, page Rebond) De loin? Oui, c'est vrai que c'est la bonne distance à laquelle il fait encore illusion. Après le traitement transcendentaire qu'il a fait subir à Deleuze, on ne peut que souhaiter à cet arracheur d'idées de battre BHL sur le terrain de l'exportation philosophique. Allez, qu'on le nomme à Berkeley et qu'on n'en parle plus. Croâââ…

lundi 14 janvier 2008

Progrès: un progrès


C'est officiel. Après de longues discussions, les concepteurs de supports se sont enfin entendus sur le nouveau format appelé à remplacer dans un avenir prochain l'antique Blu-Ray. Il s'agira du Wax-Roll Ed Hi-Son. Une version grunge-ska de "Mary had a little Lamb" est en préparation dans les studios de l'artiste d'avant-garde LJM Daguerre.

samedi 12 janvier 2008

Frictions Furieuses


Pour ceux qui ne trouvent pas toujours le ressort susceptible de les propulser dans d'autres dimensions littéraires et cherchent des territoires éditoriaux n'ayant pas froid aux yeux, on ne saurait trop conseiller la collection "Frictions", publiée par les éditions MF – et qui comptent déjà à leur actif quelques beaux titres, dont, excusez du peu, un livre de Céline Minard. En janvier sort un texte intitulé Furioso, de Dmitri Bortnikov, qu'on va vite s'empresser de dévorer. En plus, "Frictions" est dirigé par Arno Bertina et Bastien Gallet, ce qui ne gâte rien.

Thomas Pynchon: L'homme qui s'effaça rapidement



Il y a, bien sûr, un mystère Pynchon. Quasiment aucune photo, aucun entretien, pas la moindre apparition publique. Bref, le lot des trois quarts de l’humanité. Le quotidien d’une vie que le talent transforme, par sa seule magie, en destin plus qu’underground. Qu’a-t-il donc cherché à effacer, celui qui, en sept livres (mais un seul aurait suffi), s’est imposé comme l’écrivain américain le plus fabuleux depuis Melville ? Un visage ? Un regard ? La promesse redoutée d’un vieillissement ? Ou, plus simplement, la crispation en une identité dépourvue de fondements, et dont l’écriture cherche avant tout à se débarrasser ? La disparition du corps de l’auteur est un pied-de-nez à notre époque avide de photogénies, elle semble donner raison à cette mort de l’auteur qu’annonça le philosophe Michel Foucault et qui scandalisa les tenants de la pensée lagardo-michardesque.
Pynchon n’a pas fui le succès, que lui apporta très tôt la parution de V. Il a fui le sournois petit agent du F.B.I. qui piaille au fond de chacun d’entre nous. « Fichez-moi la paix, ne me fichez pas » : ce pourrait être sa devise. Quand vous irez à New York, que ce soit dans la rue, sur un banc de Central Park, ou bien accoudé au comptoir d’un bar appelé à disparaître, dites-vous : Il est peut-être là. En train de lire le journal ou d’observer un écureuil. D’écrire. L’omniprésence possible comme verso, et gage, de l’absolue invisibilité ?
Il était une fois un écrivain qui trouva suffisamment de lumière dans l’ombre pour s’installer dans le plus pur des contre-jour.
(Texte paru dans le supplément "Points" de Télérama, sept 2007)

jeudi 10 janvier 2008

Miller (mais pas Henry)


Vous aimez les cadavres d'ex en décomposition dans le coffre d'une Mustang? les poules qui se précipitent sur une autoroute? les traversées des Etats-Unis qui se terminent mal? les psycho-girls? Alors vous aimerez Decomposition, le roman de J Eric Miller que je suis en train de traduire pour… le Masque (c'est le type qui a écrit ce bouquin génial, Animal Rights and Pornography, publié par Soft Skull Press). A suivre… dans le rétro.

Sois chic (ça choque)


Mes petits camarades de la revue Inculte, ces fringants trublions qui ne reculent devant rien, viennent de commettre un ouvrage interlope qui rend tout biopic pipeule désormais risible. Ils se sont emparés d'une iconne dont j'ignorais tout, une certaine anna nicole smith, malheureusement DCD, et lui ont brossé un CV diablement inventif. Aux manettes de cette farce tragicomice: François "Multiplatine" Bégaudeau, Arno "Bogosse" Bertina, Maylis "Smiley" de Kerangal, Hélène "Choupine" Gaudy, Marie Hermann, Mathieu "Top-Gun" Larnaudie, Julien Morello, Christophe Paviot, Nicolas "Moustachio" Richard, Oliver "Nach Berlin" Rohe, Jérôme "Face de Cœur" Schmidt, Joy Sorman et Xavier Tresvaux. Espérons que l'affligeante revue Bordel ne se fende pas d'une bio-fake de Carla Brunozy…

mercredi 9 janvier 2008

Epynchonophanie


"Les cieux étaient interrompus par des nuages orageux gris foncé qui se déplaçaient telle de la pierre en fusion, mouvante et liquide, et la lumière qui se frayait un chemin à travers eux se perdait dans les champs obscurs pour se recomposer le long de la route blême, si bien qu’on ne voyait souvent que la route, et l’horizon vers lequel elle filait. Dally se sentait parfois comme éclaboussée par toute cette exubérance verdoyante, trop de choses à voir, chacune réclamant sa place. Feuilles en dents de scie, en forme de pique, longues et minces, aux extrémités émoussés, duveteuses et veinées, grasses et poussiéreuses en fin de journée – fleurs en cloches et en grappes, violettes et blanches ou jaune beurre, fougères en étoiles dans les coins sombres et humides, des millions de voilages verts tendus devant les secrets nuptiaux nichés dans la mousse et sous les taillis, tout cela passait près des roues grinçantes et cahotantes dans les ornières pierreuses, étincelles visibles seulement dans le peu d’ombre qui les caressait, une pagaille de formes minuscules en bord de route qui semblaient se bousculer pour former des rangs volontairement ordonnés, des herbes dont les amateurs de ginseng connaissaient les noms et les prix sur le marché et dont les femmes silencieuses là-haut sur les contreforts, ces homologues qu’ils ne rencontraient jamais la plupart du temps, savaient les propriétés magiques. Ils connaissaient des destinées différentes, mais chacun était l’envers secret de l’autre, et l’éventuelle fascination qui les unissait était éclairée, sans l’ombre d’un doute, par la grâce."
(Thomas Pynchon, Face au Jour)

mardi 8 janvier 2008

Le soi-disant Pagès


Avis à la population!

Le vendredi 11 Janv. 2008
Yves Pagès
à la librairie Folies d'encre (Montreuil)
pour une Signature, lecture
à 18h30



A l'occasion de la sortie de son roman Le soi-disant, Yves Pagès sera l'invité de la librairie Folies d'encre à Montreuil. Lecture signée par les Fabulous Lectors of Montreuil et buffet inventif.
Librairie Folies d'Encre, 9 avenue de la Résistance, 93100 Montreuil
Métro : Croix de Chavaux.



Ce mardi 6 février 1973, vers 19 heures 15, pendant que ma sœur était censée travailler ses gammes au Conservatoire, je voulais juste disparaître, en chien de fusil sur l’édredon, mais comme dans l’appartement, il n’y avait personne pour confirmer que j’étais chez moi, alors personne n’a voulu croire à mon alibi et on m’a soupçonné d’avoir brouillé les pistes exprès, parce que vingt minutes de solitude, à ce stade de l’enquête, c’était juste un trou noir dans mon emploi du temps et, à onze ans moins des poussières, ma parole contre la leur, ça comptait pour presque rien. »


Après Le Théoriste, et son jeune narrateur cobaye à son insu d’une expérience de laboratoire, Yves Pagès revient sur le territoire de l’enfance dans la peau de Romain, un petit fugueur halluciné. Et c’est dans l’oralité réinventée d’une langue juvénile, les images volées aux films cultes de l’époque ou les voix off d’un certain esprit contestataire, qu’il puise des trésors d’imagination, d’humour et de naïveté poignante, pour déjouer les leurres du « soi-disant » principe de réalité.

Pynchon First


J'avais oublié, pour ouvrir le bal pynchonoïdien, la parution du numéro de janvier de la revue La Nouvelle Revue Française, n°584, où l'on trouvera un extrait d'Against the Day (9 pages pour se mettre en jambes. En attendant de trouver en kiosque le nouveau mag Impur.

lundi 7 janvier 2008

Does It Look like Up to You?


Commençons l'année dans de bonnes dispositions, par une petite pensée pour Richard Fariña… 2008 ne sera peut-être pas une année pynchonante (soyons sérieux, y a un Yann Moix qui sort…), mais quand même. On aura droit à un nouveau Gibson au Diable Vauvert, à La Route de Cormac McCarthy, à la parution de Stone Junction en Lot49 assorti d'une préface du Pynch himself, avant de finir en septembre par… Face au Jour, en Fiction & Cie, et la réédition en Points de Mason & Dixon.